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par suite, que développer et affermir les sentimens de respectueuse sympathie que la très grande majorité des Français a voués au pape Léon XIII. Je serais heureux d’être, pour un moment encore, leur interprète autorisé et fidèle, au commencement du nouveau siècle qui s’ouvre aujourd’hui dans l’histoire.

J’ajouterai que, même après vingt ans d’intervalle, j’ai évité de toucher à une ou deux questions particulièrement délicates et sur lesquelles la réserve s’impose encore aujourd’hui. Je crois donc pouvoir, sans crainte, livrer ces notes à la publicité et espérer des lecteurs de la Revue l’accueil favorable qu’ils ont bien voulu faire à celles que je leur ai données, il y a cinq ans, sur mes missions en Russie et en Allemagne pendant et après la guerre de 1870.


I

J’étais ministre à Bruxelles, fort satisfait d’y être et ne pensant à aucun autre poste, lorsque, le 21 mars 1878, je reçus un télégramme chiffré, suivi d’une lettre particulière » de M. Waddington, ministre des Affaires étrangères dans le cabinet présidé ; par M. Dufaure. Il m’offrait de me proposer au maréchal de Mac-Mahon comme ambassadeur auprès de Léon XIII, qui venait d’être élevé au souverain pontificat. L’agrément du Saint-Siège, m’écrivait-il, avait déjà été demandé et obtenu, et le nonce à Bruxelles vint me voir pour m’engager à accepter. N’ayant rien su de cette négociation que ce qu’en disaient vaguement les journaux, je fus un peu effrayé des responsabilités qui pouvaient m’incomber dans cette situation nouvelle et des difficultés que je pourrais y rencontrer plus tard sur ma route. La question religieuse, en France, depuis la réélection des 363 députés de l’opposition, allait évidemment, un jour ou l’autre, se transformer en question politique de premier ordre ; et l’ambassadeur à Borne ; en subirait presque fatalement le contre-coup. Mais, d’autre part, ce que j’entendais dire à Bruxelles, où l’on conservait précieusement les souvenirs de sa nonciature, des qualités éminentes du nouveau pontife, nos anciennes relations avec la société romaine et l’honneur toujours très grand de représenter la France auprès du Saint-Siège, comme me le disait, le ministre d’Italie lui-même, me déterminèrent à accepter. J’envoyai, toutefois, à M.