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armées allemandes vers le Mein et le Neckar. Cette diversion utile indiquée par vous-même et pour laquelle vous avez déjà fait vos dispositions, doit être masquée par des préparatifs hostiles dans le haut Rhin et dans les environs d’Huningue. Il importe de faire croire aux Autrichiens que votre projet est toujours d’envahir le Brisgau. » A la date où cette lettre est écrite, le Comité n’ignore plus les succès de Jourdan sur le Rhin. Il espère que Pichegru aura pu réaliser son projet de passer le fleuve à Oppenheim, d’envahir le pays de Darmstadt à de couper ainsi toute communication entre la droite des armées alliées et leur centre. « Si cependant ce passage n’était pas encore exécuté, ajoute-t-il, s’il éprouvait même des difficultés majeures ou si le succès en paraissait en quelque sorte incertain, le Comité est d’avis que vous y renonciez pour diriger tous vos moyens d’offensive contre Mannheim. » La lettre se complète par de longs développemens sur les formes à donner à la sommation qui devra être adressée au commandant de cette place.

Ces instructions, on le voit, ne ressemblent en rien à un ordre. Elles font Pichegru maître de ses décisions et seul juge de la conduite à tenir. Aussitôt qu’il les a reçues, il y répond. « En formant le projet d’un passage du Rhin à Oppenheim, j’avais deux objets en vue, comme je vous l’ai mandé : l’un de faire diversion aux dispositions offensives de l’ennemi sur le haut Rhin ; l’autre de satisfaire aux conditions de la capitulation du fort de Mannheim, en portant la guerre sur la rive droite, afin de pouvoir sommer cette place. Le passage que vient d’effectuer l’armée de Sambre-et-Meuse vers Dusseldorf remplit à peu près ces deux objets. En conséquence, la sommation va avoir lieu, d’après les principes énoncés dans votre lettre que je viens de recevoir, et je me persuade qu’elle aura tout le succès que l’on en peut attendre. Je ne laisserai pas de continuer les préparatifs qui se font sur Oppenheim. Mais l’exécution sera subordonnée, ainsi que vous le recoin mandez, aux probabilités du succès, dans le cas où l’ouverture des portes de Mannheim ne le rendrait pas inutile. J’arrêterai provisoirement mon équipage de pont à la hauteur de cette ville jusqu’à la réponse à la sommation, afin d’être à même d’en profiter sur-le-champ, s’il y a lieu. Je ferai aussi dans le même temps continuer des démonstrations sur le haut Rhin, pour y retenir un grand nombre de troupes que l’ennemi y a en ce moment. »