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jésuite, capucin, que nous nous voyons menacés de retourner aux pires jours des entreprises dévotes, de la mystérieuse Congrégation, des billets de confession, des cordons de Saint-Acheul ! C’est bien de ce côté-là que nous penchons, et, si nous devons sombrer en quelque cataclysme social, il arrivera qu’au fond, tout se trouvera recouvert de calottes de prêtres, de capuchons de moines, de mitres d’évêques, rien autre ! Où sont les naïfs qui croiront cela ? Je ne demande pas où sont les sectaires qui agiront comme s’ils le croyaient !

Dût-on crier au paradoxe, je soutiens que jamais les congrégations n’ont exercé une action politique moindre ? que celle exercée par elles à cette heure ; que jamais elles ne se sont mieux maintenues dans leur véritable rôle, qui est de prier, de prêcher, d’enseigner, de secourir. Il en est deux raisons principales. La première, c’est que les congrégations sont généralement composées d’hommes intelligens, — certains même leur reprochent d’en renfermer trop ; — que les gens intelligens savent qu’il y a des courans qu’on ne remonte pas ; que parmi ces courans-là se trouvent, plus que tous autres, ceux qui entraînent les démocraties ; et, de fait, pour qui a pris soin de relever leur attitude, de suivre leurs manifestations, elles n’ont pas cherché à le remonter, mais à y verser quelques idées de foi et de charité, dans l’espoir que la grande démocratie française pourrait être une démocratie chrétienne. Non seulement elles ont accepté sans résistance la parole du chef de l’Eglise expliquant que celle-ci n’a jamais banni aucune forme de gouvernement, que, sous la République comme sous la monarchie, le principal est d’éclairer les âmes, de réconforter les vacillans, soutenir les faibles, aider les misérables, de se dévouer pour ses frères, mais immédiatement elles l’ont mise en pratique avec une sympathique ardeur.

Pourquoi donc auraient-elles eu l’antipathie de la forme républicaine à ce point de combattre un gouvernement par cela seul qu’il aurait été une république ? Elles-mêmes ne sont pas autre chose, la république de la vraie fraternité et de la vraie égalité, celle aussi de la vraie liberté, parce que, lorsqu’on l’a aliénée, cette liberté, on est toujours maître de la reprendre ; parce qu’on n’obéit librement que pour rendre l’effort vers le bien plus énergique, le dévouement plus utile.

Cela ne veut pas dire que les couvens soient peuplés de républicains à la manière de M. Brisson ou de M. Trouillot ; il y a