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certains voisinages, — on rencontre bien des conceptions diverses du gouvernement républicain : il y a la République libérale, et puis, il y a l’autre, la radicale et la jacobine ; à laquelle appartient le nouveau projet de loi sur les associations ? Pas plus par la rigueur de ses dispositions et le but poursuivi que par le langage de son rapporteur il ne se rattache à la République libérale ; on sent partout le souffle de l’autre ; dès lors, nous nous trouvons en face des vieilles traditions, des vieilles passions révolutionnaires : la haine du prêtre, l’horreur du moine, l’envahissement de la société civile par les menées cléricales : oppression des consciences, fanatisme, superstition, spoliation des familles sont ici langage courant, si bien que c’est non seulement un droit, mais un devoir de contrôler des affirmations derrière lesquelles il est permis d’entrevoir autre chose que la réalité des périls annoncés.


V

Avant de procéder à ce contrôle, je tiens à formuler quelques déclarations de nature à faire comprendre dans quel esprit il sera exercé.

Il n’est pas nécessaire d’appartenir aux républicains d’un certain groupe, ou, si l’on aime mieux, d’une certaine trempe, pour avoir le souci des droits de la société civile, pour n’être disposé à les incliner devant personne, pour vouloir les défendre contre tout empiétement d’où qu’il vienne. A chacun son rôle ; à chacun sa sphère. A la société religieuse, renseignement, la propagation de la foi, les âmes, la direction des consciences, les grandes clartés à répandre sur la vie présente par les grandes espérances à montrer dans la vie future. A la société civile, la liberté et l’indépendance du citoyen, qui font sa dignité : l’entière liberté de choisir la forme de gouvernement qu’il juge la meilleure, d’organiser les forces du pays de la façon qu’il croit la mieux faite pour garantir sa sécurité, défendre son honneur, assurer sa prospérité, l’oint d’envahissement par la société religieuse, sous prétexte que la direction des âmes, touchant à tous les intérêts, permet, sinon commande d’intervenir dans toutes les questions : la société civile n’est pas faite pour être conduite par îles prêtres ou par des moines. Point d’oppression de la société religieuse par la société civile : la société religieuse n’est pas faite pour jouer