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— Amende de 500 à 5 000 francs, emprisonnement de six jours à un an, contre les membres d’une association non pourvue de cette autorisation dans le délai de six mois (art. 11 et suiv.).

Ceci, avec les commentaires du rapport, c’est la mort avec phrases ; il faut se placer résolument en face du droit et de la justice, pour se demander si cette mort peut être prononcée.


II

D’abord, le droit en lui-même : le droit au point de vue abstrait, philosophique.

Je demande s’il en est un qui plonge plus avant dans les entrailles mêmes de l’être humain. Est-ce que l’homme est complet, quand il est seul ? Væ soli ! Est-ce que la loi de sa vie n’est pas de joindre d’autres forces à ses forces propres, de les chercher, de les demander ? Si l’on sait analyser tous les actes qu’on voit s’accomplir, on n’en trouvera, pour ainsi parler, pas un seul qui ne comporte un secours, une assistance, une association quelconque d’efforts, ou comprendra que les plus puissans en ce monde sont surtout ceux qui savent user de leurs facultés pour grouper les individus, en former des associations et s’en servir.

Le rapport de M. Jules Simon sur la proposition de loi de M. Dufaure débutait ainsi :

« L’homme est si peu de chose par lui-même qu’il ne peut faire beaucoup de bien ou beaucoup de mal qu’en s’associant. De là les jugemens contradictoires dont l’association est l’objet. Les uns ne croient pas que la société puisse être en sécurité avec elle, et les autres n’admettent pas qu’on puisse se passer d’elle.

« Nous croyons qu’il n’y a pas d’armure plus solide contre l’oppression, ni d’outil plus merveilleux pour les grandes œuvres, ni de source plus féconde de consolation et de bonheur. Nous croyons d’ailleurs qu’on peut la rendre inoffensive, en l’entourant de publicité et de lumière. Les sociétés modernes ne peuvent se passer ni de la développer, ni de la réglementer. »

Voilà assurément un grand et noble langage ; il n’y a plus qu’à souhaiter de voir les conclusions en harmonie avec ces belles prémisses.

Donc le droit d’association est, dans son essence, un droit naturel entre tous, viscéral, peut-on dire, pour tout être humain, pour toute société humaine ; comment se pourrait-il faire qu’il