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d’éprouver quelque satisfaction à voir le ministre des Finances de la République française faire sienne cette politique, et inaugurer, dans le budget de 1901, le système du remboursement de rentes perpétuelles au moyen d’annuités terminables. On connaît l’ingénieux mécanisme par lequel les Gladstone, les Childers, les Lowe, les Northcote dégrevaient l’avenir, ou du moins le préparaient à supporter de nouveaux sacrifices quand l’heure en aurait sonné : ils prenaient dans le portefeuille des administrations publiques, telles que caisses d’épargne postales et banques d’épargne, des rentes perpétuelles qu’ils annulaient ; en échange, ils servaient à ces caisses ou banques des annuités au nombre de dix, douze, ou tel autre chiffre, calculées de façon à permettre aux administrations en question de racheter, durant la période de paiement des annuités, un total de rentes égal à celui des titres annulés : à cet effet, l’annuité comprenait une somme égale à l’intérêt des titres annulés et la somme suffisante à l’achat de nouvelles rentes. M. Caillaux a inscrit, pour inaugurer une opération de ce genre, au budget du ministère des Finances, une première annuité de 37 millions : au moyen de vingt annuités semblables, il annulera un capital de 560 millions de rentes 3 pour 100 appartenant à la Caisse des dépôts et consignations. Nous espérons voir les crédits affectés à cet emploi éminemment sage et judicieux grandir dans nos budgets futurs, et nos ministres suivre l’exemple que leurs collègues de Londres leur avaient si longtemps donné, et dont ils s’écartent aujourd’hui.

De quelque côté qu’ils tournent leurs regards, nos voisins voient des périls naître de celle guerre, qui semble les avoir jetés hors de la route dans laquelle, au cours Au XIXe siècle, ils avaient trouvé tant et de si légitimes succès. Combien de voix s’élèvent, parmi celles des meilleurs et des plus nobles de ses enfans, pour déplorer le déchaînement de chauvinisme brutal et irréfléchi qui se manifeste dans les villes du Royaume-Uni et qui provoquait, il y a peu de jours, les scènes fâcheuses qui ont marqué l’entrée à Londres des volontaires de la Cité revenant de leur campagne africaine. Si nous imprimions quelques-uns des discours qui se tiennent et des articles qui s’écrivent en ce moment de l’autre côté de la Manche, nos lecteurs se refuseraient peut-être à croire que des critiques aussi sévères sortent de la bouche ou de la plume de citoyens anglais. C’est d’ailleurs l’honneur de ce pays, qui ira pas encore perdu le sentiment de la liberté vraie, que de