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Ceux-ci ont pris l’habitude immémoriale de ce contact ; ils s’y sont adaptés ; et. ce ne serait pas sans quelque inconvénient qu’on les mettrait trop brusquement en présence d’un autre constituant minéral. Chez certains animaux saignés à blanc, la vie peut être entretenue pendant quelque temps, si l’on remplace le sang par cette solution salée que l’on nomme, à cause de ses propriétés, la solution physiologique. Une tortue, une grenouille, dans les veines desquelles circule cette liqueur, continue de vivre assez longtemps. Sans doute ce n’est pas une liqueur généreuse ; les particules vivantes élémentaires n’y trouvent point de quoi se ravitailler et s’entretenir, et elles n’y peuvent vivre qu’autant que durent leurs propres réserves ; mais au moins, n’ont-elles point à en souffrir.

Ceci posé, on peut commencer à comprendre ce que deviendra le sel que le besoin singulier dont nous avons parlé nous oblige à ingérer ? Il est facile d’en tirer l’horoscope. La plus grande partie restera en simple solution : une autre entrera en combinaison plus ou moins intime avec la substance vivante. La première pénétrera dans les liquides circulans, lymphe et sang ; elle parcourra, avec eux, tous les départemens de l’organisme sans prendre aucune part directe aux mutations vitales, mais, au contraire, réduite à un rôle de remplissage, faisant nombre par ses molécules de manière à neutraliser le danger que ferait courir à la société cellulaire un milieu trop dilué ; et elle sortira, enfin, par les émonctoires naturels, invariable, inaltérée, mais ayant rendu le service de débarrasser l’économie de la tourbe des déchets sociaux. Ce sel éliminé doit être remplacé Sa perte ressentie par l’organisme est un premier élément du besoin de sel.

La seconde portion, et la plus faible, du sel ingéré pénétrera dans les élémens eux-mêmes, en fera partie intégrante, participera aux mutations chimiques, non seulement à celles qui donnent naissance au suc gastrique, mais à d’autres encore, dans lesquelles elle (est finalement détruite et perdue pour l’organisme. Le vide laissé par cette continuelle élimination est sans doute pour quelque chose encore dans la sensation du besoin de sel qu’éprouve l’animal. C’en est un second élément.