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LE
MÉCANISME DE LA VIE MODERNE

XIX.[1]
LE PRÊT POPULAIRE
MONTS-DE-PIÉTÉ. — BONS CRESPIN. — CRÉDIT MUTUEL


I

La location de l’argent, le prêt à intérêt, fut longtemps, comme on sait, un délit aux yeux de l’Etat, un péché aux yeux de l’Eglise. Les mœurs étaient, au moyen âge, d’accord avec les lois pour le réprouver. Les docteurs n’auraient-ils fait que partager l’erreur économique de leur temps, l’idée fausse que l’on avait, bien avant l’institution du christianisme, sur « l’argent issu de l’argent, » qu’Aristote estimait un profit contre nature ? Toujours est-il que, par une aberration générale, les mêmes gens qui trouvaient tout naturel de louer leurs terres ou leurs maisons estimaient dégradant de louer leurs espèces monnayées ; qu’à cette époque de servage, où la personne humaine, susceptible de vente ou d’achat, était considérée comme une marchandise, dont le possesseur, clerc ou laïque, surveillait très strictement et s’appropriait, en toute sûreté de conscience, l’accroissement

  1. Voyez la Revue du 15 août 1900.