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LA PLÉIADE FRANÇAISE

DEUXIÈME PARTIE[1]


LA POÉTIQUE ET LA PLÉIADE

On a vu comment, dans quelles circonstances, autour de quelles idées, s’étaient d’abord groupés les poètes de la Pléiade, et quelle occasion les avait obligés, — un peu plus tôt qu’ils ne l’eussent voulu, — de préciser ce que ces idées, très générales, avaient encore de vague et de flottant. C’est ce qui explique ce que l’on peut aisément relever, dans la Défense et Illustration de la langue française, de provocateur et de hâtif à la fois. L’opuscule se sent de la chaleur, mais aussi de la rapidité de l’improvisation : l’auteur ou les auteurs, — car, sans pouvoir le prouver, je ne doute pas que Ronsard y ait mis la main[2], — s’y répètent et s’y contredisent ; ils savent moins ce qu’ils veulent que ce qu’ils ne veulent pas ; le développement de leur pensée n’y a point toujours de juste proportion avec son importance ; et, pour toutes ces raisons, si l’on veut bien saisir la signification et la portée du manifeste, le pire moyen qu’on en pourrait prendre serait certainement de l’« analyser. »

On ne saurait non plus l’isoler des opuscules moins fameux qui l’ont précédé ou presque immédiatement suivi. Ce Thomas Sibilet, à l’Art poétique duquel nos érudits de Coqueret avaient répondu par leur Défense, ne voulut pas, comme on le pense bien, demeurer sous le coup de cette éloquente invective, et il

  1. Voyez la Revue du 15 décembre 1900.
  2. Comparez notamment le chapitre intitulé : du Long Poème françois, et la seconde préface sur la Franciade, qu’on a retrouvée dans les papiers de Ronsard, mais qu’il n’a publiée lui-même dans aucune édition de ses Œuvres.