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Quelques mois s’étaient à peine écoulés quand les puissances dégagèrent de ces prémisses une première conséquence. A leur instigation, le prince Kong obtint de l’empereur Tao-Kouang, son frère, l’établissement d’un ministère spécial, chargé de toutes les affaires qui pouvaient concerner les Européens. Aux termes de l’édit impérial publié le 20 mars 1861 à Canton, ce ministère fut installé dans la capitale ; le prince Kong, Ysin, le chancelier Koueï-liang et Wen-siang, vice-président du bureau du revenu, en étaient nommés membres. On frappa pour son usage un sceau, portant cette inscription : Surintendance impériale des relations commerciales avec les nations étrangères. Huit sous-secrétaires d’Etat étaient choisis parmi les secrétaires du conseil de l’intérieur, des ministères et du conseil d’Etat. Un vice-président, Tsung-hou, dut résider à Tien-tsin et fut spécialement chargé de surveiller les intérêts commerciaux dans les trois ports du Nord (Nui-chwang, Tien-tsin, Teng-chou). On devait rendre un compte périodique à l’empereur de toutes les communications officielles adressées par les représentans des nations étrangères. C’était assurément un nouveau trait d’union : jusqu’alors, les relations avec les Européens avaient été dirigées par le ministère des Colonies, les nations étrangères étant regardées comme de simples populations tributaires !

Il répugnait à la Chine d’accorder aux étrangers la libre navigation de ses fleuves. M. Prosper Giquel qui, exerçant un grand commandement dans l’armée régulière chinoise, avait aidé le Céleste-Empire à réprimer l’insurrection des Taïpings, blâmait encore les Chinois, douze ans après la ratification du traité de Tien-Tsin, de mettre tout en œuvre pour empêcher l’ouverture de nouveaux ports, et s’efforçait d’établir qu’ils se méprenaient sur leur intérêt véritable. Cependant le plénipotentiaire Koueï-Liang avait accepté, sans nul doute à son corps défendant, qu’on insérât dans le traité du 27 juin 1858 cette proposition d’apparence paradoxale : « L’expérience ayant démontré que l’ouverture de nouveaux ports au commerce étranger est une des nécessités de l’époque… » Bref, les hautes parties contractantes ajoutaient à la liste dressée en 1842 « les ports de Kiung-Tchau et Chaou-Chaou dans la province Kuang-Ton, Taïwan et Taashwi dans la province de Formose, Tan-Tchau dans la province de Chan-Tong et