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mais c’en était, au fond, l’annexe et le commentaire, donné par l’Empereur lui-même.

La Chine, au demeurant, se rattachait par un lien plus intime et plus indestructible à la société des peuples. Elle s’était placée dans l’orbite du droit international positif. Elle pouvait, sans doute, manquer à ses nouveaux engagemens ; mais il était loisible aux autres parties contractantes d’en imposer l’exécution.

C’est ainsi que, des missionnaires anglais ayant été maltraités en 1848 dans les environs de Changhaï, les Anglais purent parler très haut, bloquer des jonques impériales chargées de grains, envoyer deux bricks de guerre : ils obtinrent satisfaction. En 1851, un lazariste français, le Père Carayon, fut arrêté dans le Nord et tellement maltraité qu’il mourut en arrivant à Macao. Mais Canton fut le siège d’une résistance persévérante : les mandarins, en dépit des traités, renfermèrent, comme auparavant, les étrangers dans l’enceinte des factoreries et se refusèrent à toute communication verbale avec les autorités européennes : « Voilà donc les choses replacées à Canton sur le même pied qu’avant la guerre, » écrivait en 1857 le Prince de Joinville. Bien plus, depuis un an, la situation s’était aggravée. En 1856, une embarcation sous pavillon anglais, commandée par un capitaine nominal anglais, munie de papiers anglais, fut visitée à Canton par des soldats chinois sur la demande d’un indigène qui avait cru reconnaître un pirate dans l’équipage : une partie de cet équipage fut capturée, le pavillon anglais fut amené, malgré les traités, sans qu’il eût été loisible au consul anglais d’intervenir. Enfin, le 21 février 1856, le Père Chapdelaine, missionnaire français, fut arrêté par les Chinois et mis à mort. La cause des deux grandes nations occidentales devint celle du monde civilisé. Le baron Gros, lord Elgin, le comte Poutiatin, M. Reid, se présentèrent à l’embouchure du Peï-ho avec une escadre composée de vaisseaux français, anglais, russes, américains. Ils demandèrent une audience à l’Empereur, qui la leur refusa. Les alliés emportèrent les forts de Takou le 20 mai 1856 et, dès le mois suivant, un premier arrangement fut conclu à Tien-tsin par lord Elgin. Le second traité de Tien-tsin, qui semblait devoir être définitif, fut signé, le 27 juin 1858, par la France et l’Angleterre.

Je m’expliquerai bientôt sur le sanglant affront fait aux drapeaux de la France et de l’Angleterre en juin 1859 et sur l’insigne trahison de septembre 1860. Je me borne à signaler en ce