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docteur William Beaumont d’étudier le fonctionnement de l’estomac chez l’homme vivant et inspira à Blondlot la hardiesse de pratiquer délibérément chez les animaux une fistule artificielle analogue à cette fistule accidentelle.

Jusque-là, l’estomac avait joui du bénéfice de sa royauté. On ne porte pas la main sur le roi. Les chirurgiens l’avaient respecté. Ils ne tardèrent pas à suivre l’exemple des physiologistes. Ils n’hésitèrent plus à l’ouvrir lorsqu’il y avait urgence, à le débarrasser d’un objet nuisible, et c’est ce que fit le docteur Labbé, l’un des premiers.

D’autre part, les études des physiologistes continuant, le progrès des connaissances se précipita. En quelques années, à partir de 1842, date des premières expériences de Blondlot, on acquit sur les fonctions de l’estomac, sur le suc gastrique qu’il sécrète et sur le ferment, la pepsine, qui y est contenu, les notions qui ont constitué jusqu’à ces dernières années le bilan de nos connaissances.


V

Ces connaissances ont reçu, assez récemment, un accroissement très notable, grâce aux expériences admirablement conduites par le professeur Pawlow à l’Institut impérial de médecine expérimentale de Saint-Pétersbourg. Ces intéressantes recherches ont comblé une importante lacune de la physiologie de l’estomac.

On avait, sans doute, poussé très loin, en ces dernières années, l’étude du suc gastrique. On connaissait les manières de l’obtenir, non seulement chez les animaux, mais chez l’homme même. Les médecins prélèvent sans trop de difficultés, dans l’estomac de leur patient, au moyen du tube de Fauchet, des échantillons dont l’analyse permet de suivre les particularités du fonctionnement gastrique et ses diverses phases.

On avait étudié aussi très attentivement la composition chimique de ce suc stomacal. On sut qu’il était caractérisé à l’état normal par trois substances : l’acide chlorhydrique, qui lui donne son acidité, et deux fermens ; la pepsine, qui agit en milieu acide sur les alimens azotés ; et le ferment lab ou présure, qui coagule le lait.

Il y a eu un nombre infini de publications, toute une littérature, sur la seule question de l’acide gastrique. Il a fallu en établir la nature et choisir, pour cela, entre les neuf substances acides, plus ou moins accidentelles, qui s’y rencontrent. Il a fallu décider si l’acide chlorhydrique, qui a définitivement triomphé de tous ses rivaux, était