Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 162.djvu/180

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dépense de ce chef sera cette année d’environ 50 millions de francs supérieure à ce qu’elle avait été en 1898 ; puis les produits chimiques ; puis les filatures ; puis la métallurgie. Il peut sembler bizarre que nous mettions la métallurgie au dernier rang parmi les industries dont les bénéfices soient atteints par la hausse du combustible, alors qu’il faut plus de deux tonnes de charbon pour produire une tonne de fonte (exactement 9 pour 4) ; l’explication en est simple : aucun produit ne suit, dans les oscillations de ses prix, le charbon de plus près que le fer. Au contraire ni les compagnies de transports maritimes ni celles de chemins de fer ne relèvent leurs tarifs, ni les filatures, ni les usines de produits chimiques ne sauraient faire accepter de leur clientèle une majoration de leurs prix de vente fondée sur cette hausse du charbon. On voit combien il est délicat de démêler ces incidences multiples et diverses.

La production du charbon, en dépit de l’accroissement annuel de son chiffre, ne paraît pas avoir l’élasticité à laquelle on pourrait s’attendre, si l’on considère les bénéfices que les propriétaires de houillères réaliseraient en augmentant rapidement leur production quand les demandes se multiplient. Il y a à cela deux raisons d’inégale importance : la première est que, pour accroître l’extraction, il faut organiser des travaux préparatoires : fonçage de puits, traçage de galeries, recrutement de population ouvrière, construction de maisons pour la loger, qui demandent un temps plus ou moins long et qui souvent ne sont terminés que lorsque la demande s’est ralentie : les quantités supplémentaires de charbon arrivent alors sur les marchés au moment où le besoin s’en fait moins sentir, et contribuent à accélérer la baisse. La seconde raison, d’une nature plus durable, est que l’ouvrier mineur ne paraît pas en général désireux de profiter des époques de prospérité pour gagner des sommes supérieures à ses besoins immédiats : comme la hausse de la houille est presque toujours accompagnée de celle des salaires, le mineur travaille moins et empêche ainsi la production de croître au fur et à mesure des exigences de la consommation : c’est l’inverse de ce qui se produit presque toujours dans l’industrie. Les grèves, si fréquentes parmi les mineurs, sont une autre cause de renchérissement : le monde se ressent encore des effets de la grève de Cardiff, qui se prolongea pendant plusieurs mois en 1898, et va peut-être souffrir de celle qui menace d’éclater aux Etats-Unis.