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apportent un élément qui modifie les données du problème. Nous ne rechercherons pas non plus la mesure dans laquelle les forces nouvelles, telles que l’électricité, dont la source se puise dans les cours d’eau et se puisera peut-être un jour dans les marées, se substitueront à celle qui a la houille pour générateur. Dans les nombreux travaux que les Anglais ont publiés sur un sujet qui les touche de si près, des différences d’opinion considérables se sont fait jour. Le calcul est malaisé à établir ; car si, dans des bassins explorés et exploités depuis longtemps, on arrive à un cubage plus ou moins exact des masses houillères, au moins jusqu’à une profondeur déterminée, il est pour ainsi dire impossible de deviner la marche que suivra la consommation. Celle-ci ne sera pas seulement influencée par le développement de l’industrie, par les demandes des particuliers ; le jour où l’épuisement des charbonnages commencerait à être entrevu, le désir de ménager cette ressource stimulerait à la fois l’esprit d’économie dans son usage et le génie inventif des savans occupés à lui trouver des succédanés : déjà les machines contemporaines consomment infiniment moins de houille par cheval-vapeur que celles du début. Il faut aussi séparer la question de l’épuisement réel du charbon de celle que nous appellerons, avec Jevons[1], l’épuisement commercial, et qui résulterait d’une situation où la houille ne pourrait plus être extraite du sol à un prix inférieur à celui de vente. Cela ne saurait évidemment se produire que si, d’une façon générale, cette matière première était devenue moins nécessaire à l’humanité ; ou bien encore le phénomène pourrait apparaître dans un pays déterminé, où les conditions d’exploitation seraient plus défavorables que chez d’autres, qui seraient à même d’exporter et de venir lui faire concurrence à l’intérieur de ses frontières. On se représentera cette situation en considérant la lutte que les charbons américains inaugurent en Europe avec les houilles indigènes.

M. Lozé nous rappelle les conjectures auxquelles les Anglais se livraient aux environs de l’an 1860, pour essayer de déterminer la loi de consommation et d’épuisement de la houille. Ils arrivèrent à des résultats tellement divergens qu’il est inutile de les citer : ils ne pourraient que jeter la confusion dans l’esprit du lecteur. Nous mentionnerons toutefois le travail, demeuré

  1. The coal question, 1866.