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PATRIOTISME ET HUMANITARISME
ESSAI D'HISTOIRE CONTEMPORAINE

II[1]
1870-1871

Au début de 1870, l’opposition républicaine était inquiète : elle tremblait que l’Empire, fortement appuyé sur une armée reconstituée, n’engageât brusquement une guerre offensive. Les Césars aiment les lauriers et les prétoriens aiment le sang : l’opposition avait le culte de l’humanité et la haine des pouvoirs forts. Le péril, à ses yeux, n’était point au-delà du Rhin ; il était aux Tuileries. Patriote, elle désirait l’être ; mais la vie d’une nation, pour elle, ne comportait, si l’on peut ainsi dire, que deux mouvemens : le mouvement du peuple « libre, » votant en masse, d’une façon périodique ; et le mouvement de la milice, qui n’est autre que ce peuple lui-même, milice « libre, » elle aussi, et se levant en masse, d’une façon spontanée ; et les urnes étaient faites pour garantir la liberté contre les ennemis intérieurs, et les armes étaient faites pour garantir la liberté contre les ennemis extérieurs. Or, ces deux mouvemens, celui du peuple votant et celui du peuple armé, étaient maîtrisés ; l’Empereur possédait les urnes et les armes ; l’opposition républicaine, qui, après le second

  1. Voyez la Revue du 15 juillet.