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III


À son retour du Japon, où la photographie avait joué un grand rôle dans l’observation du passage de Vénus, et dès qu’on fut, tant bien que mal, installé à Meudon, M. Janssen résolut d’approfondir le problème de la reproduction photographique de la surface du Soleil. Les images obtenues jusque-là, même les plus parfaites, ne montraient pas les détails délicats de la surface visible : il était évident que le temps de pose avait été toujours tout à fait exagéré ; il restait sans doute beaucoup à faire. Il s’agissait d’abord de choisir les rayons sur lesquels devait porter l’achromatisme de l’objectif ; on s’arrêta aux rayons violets, et les verres furent taillés en conséquence. On dut se préoccuper ensuite des moyens d’augmenter la finesse de la couche sensible, et d’en mettre la sensibilité spectrale en rapport avec la teinte de l’image. Il fallait enfin régler minutieusement la durée de l’exposition ; M. Janssen y parvint en se servant d’un appareil ingénieux qu’il nomme trappe photographique, et qui permet de réduire la durée de l’action lumineuse à 1/3000 de seconde. Le diamètre des images fut porté successivement à 20, à 30, et parfois jusqu’à 70 centimètres. En dosant ainsi, d’une manière rigoureuse, l’action de la lumière, M. Janssen a réussi à obtenir des épreuves photographiques du Soleil dont la perfection n’a été égalée nulle part. L’observatoire de Meudon possède aujourd’hui une admirable collection de quelques milliers de clichés qui constituent son trésor, et dont les spécimens joints au tome Ier des Annales peuvent donner une idée.

Ces photographies ont révélé des détails de la photosphère que les plus grandes lunettes étaient impuissantes à montrer, ou du moins qu’on n’apercevait que très rarement. C’est ainsi qu’un éminent astronome américain, M. Langley, disait à M. Janssen, dans une visite à Meudon, en 1877, que les détails montrés par ces images, il ne les avait aperçus, pendant vingt années d’observations, que cinq ou six fois, pour quelques secondes seulement. C’est sans doute la durée si courte de la pose qui donne ici à la photographie la supériorité sur l’œil.

« Les photographies du Soleil, dit M. Janssen, sont à la fois les plus faciles et les plus difficiles à obtenir. Elles sont les plus faciles, si l’on veut se contenter de la reproduction générale de la