Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 161.djvu/813

Cette page a été validée par deux contributeurs.

L’ASTRONOMIE EXPÉRIMENTALE
ET
L’OBSERVATOIRE DE MEUDON

I

L’éclipse totale de soleil du 18 août 1868 marque une date inoubliable dans l’histoire de l’astronomie. Ce jour-là, fut levé pour toujours le voile qui, jusqu’alors, cachait aux yeux des hommes les mystérieux phénomènes de la surface solaire. Un savant français, dont le nom, aujourd’hui illustre, faisait déjà autorité dans la science (M. Janssen avait alors quarante-quatre ans), avait été chargé d’aller observer la grande éclipse dans une station de l’Inde anglaise. Il avait choisi la ville de Guntour, et s’y était établi avec ses lunettes et ses appareils de physique, occupé à familiariser ses aides avec le maniement des instrumens. Mais l’éclipse approchait et le temps s’était gâté : il pleuvait, depuis quelques jours, sur toute la côte. Par miracle, le temps se remit la veille, et le 18 août le soleil brillait de tout son éclat. L’éclipse put être observée avec un plein succès ; on put étudier notamment deux magnifiques protubérances, dont l’une rappelait la flamme d’un feu de forge et l’autre une montagne neigeuse, embrasée par un soleil couchant. Les raies brillantes de leur spectre prouvaient qu’elles étaient formées d’hydrogène incandescent. Et c’est en contemplant ces raies que M. Janssen, par une inspiration de génie, entrevit la possibilité d’observer les