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et les plages découvertes. De là, ceux qui sont grands voiliers rayonnent dans une vaste étendue de l’Atlantique et du Pacifique et jusque dans les parages du cap Horn.


Les oiseaux de la banquise sont peu nombreux. M. Racovitza n’en a signalé que six espèces : trois pétrels, un goéland et deux manchots.

Le goéland, c’est le goéland brun. Il est de la taille d’un canard ; mais il possède des ongles forts et crochus comme les véritables oiseaux de proie, dont il a d’ailleurs quelques habitudes. Il est d’un naturel courageux et il tient tête à l’homme même, lorsqu’il croit sa progéniture menacée. M. Racovitza a soutenu contre un couple de ces animaux une lutte qui n’était point sans danger pour eux, et il a rendu hommage à leur bravoure en la comparant à celle de l’aigle même. De l’autre côté du continent antarctique, sur la terre Victoria, M. Borchgrevink les a retrouvés, faisant leur proie des jeunes manchots au moment de leur éclosion ; attaquant les chiens de l’expédition, s’en prenant même aux hommes. Ils fondaient sur leur tête avec impétuosité et essayaient de les frapper à coups d’aile ; puis reprenaient du champ pour renouveler l’attaque.


Le Pétrel des neiges est un élégant petit oiseau qui s’est montré le compagnon le plus assidu des explorateurs de la Belgica pendant son séjour sur la banquise. Son plumage satiné est plus blanc que la blanche hermine ou que la neige même. On le voit planer gracieusement, comme un léger flocon, au-dessus des crevasses et des chenaux du champ de glace, guettant les petits animaux marins dont il fait sa proie, et se précipitant sur eux prestement. Il fond sur eux dès qu’il les aperçoit, avec tant de légèreté et d’adresse qu’il trouble à peine la surface de l’eau. Mais son ramage ne vaut point son plumage. Sa voix est criarde et désagréable, et lorsque l’on veut le saisir, il se défend d’une manière dégoûtante en vidant le contenu mal odorant de son jabot.

Le Pétrel antarctique, ou damier brun, est aussi un oiseau au plumage élégant. Quant à la troisième espèce, le grand Pétrel, il est plus gros ; il atteint à la taille de l’oie domestique. Ses ailes sont fort étendues ; leur envergure peut dépasser deux mètres. Ses habitudes sont celles du vautour ; comme le vautour il se