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nourriture. Ce sont des protozoaires, des crustacés, des mollusques, des annélides, tous de petite taille, mais rachetant leur exiguïté par leur nombre. Il est tel, que quelques espèces constituent de véritables bancs sous la glace. Et ces êtres, à leur tour, forment la base de l’alimentation des animaux de plus grande taille, les phoques, les cétacés et les oiseaux, par exemple, que nous allons tout à l’heure trouver parmi les hôtes de la banquise.


La flore de la banquise se réduit à ces diatomées. Le règne végétal n’y a point d’autres représentans. Et comme les terres voisines, recouvertes d’un manteau de glace épais et persistant, sont impropres au développement de la vie, on pourrait dire que c’est là toute la flore antarctique. Cependant, les explorateurs belges ont aperçu, en quelques endroits, la terre ferme et la roche à nu. Cela est arrivé pendant qu’ils naviguaient dans le canal qui devait les conduire de l’Atlantique à la banquise, et qui portera désormais le nom de détroit de la Belgica ou détroit de Gerlache. Là ils ont trouvé quelques plages découvertes, et quelques petites îles débarrassées de glace. La roche apparaissait encore à nu sur la paroi des falaises à pic qui supportent la croûte glacée qui constitue l’inlandsis.

Une pauvre végétation se développe sur cette faible portion de la terre antarctique. M. Racovitza y a recueilli vingt-six espèces de mousses, des hépatiques et des lichens plus abondans. L’étude préliminaire de ces mousses a été faite par M. Cardot. Leur végétation semble vigoureuse ; mais elles sont stériles et ne fructifient point. Un autre fait curieux, c’est qu’elles n’ont presque aucun rapport avec celles des terres magellaniques. A peine trouve-t-on deux mousses communes aux deux flores. Et ces plantes, différentes de celles du continent le plus voisin, offrent la ressemblance la plus frappante avec celles de la région la plus éloignée, la zone polaire arctique.

La même observation a été faite pour les hépatiques par M. Stephani. Si le fait se généralise, comme il est probable, il faudra conclure que les deux zones polaires, si écartées l’une de l’autre et sans communication, ont des flores entièrement semblables entre elles et différentes de celles de toutes les contrées interposées.

Il faut cependant attendre, avant d’affirmer ce fait, que l’étude soit achevée des collections rapportées par le Fram, par