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dans la diminution de la valeur morale chez les hommes politiques : ils ont, paraît-il, perdu l’habitude de sacrifier au bien de la patrie les avantages personnels ; ils ne savent plus ce que c’est que le désintéressement. M. Arbib ressuscite, sous leurs regards qu’il voudrait sentir confus, la physionomie plus pure des hommes de la génération précédente : et son article s’achève sans conclusion, comme il arrive en général pour les éloges du temps passé.


Victor-Emmanuel, lui, acceptera-t-il de se réfugier dans le passé comme dans une impasse ? Il constatera, plutôt, que les temps sont nouveaux ; qu’avec Humbert Ier, le valeureux soldat de Custozza, la période épique de l’histoire d’Italie s’est close ; qu’il doit, lui, jeune monarque, être l’éducateur de ces populations qui semblent s’abandonner ; que dans la péninsule, tout s’est modifié, sauf l’auguste réserve du Vatican, qui doit voir et qui voit plus haut et plus loin que l’Italie et qui n’a pas besoin d’assouplir ses maximes et ses démarches aux caprices éphémères de l’histoire. Et cette évolution dont l’issue fait trembler, et cette ténacité qui vient de se montrer de plus en plus sûre d’elle-même, seront à Victor-Emmanuel III, dans sa solitude provisoire de Capodimonte, un double sujet de réflexion. La politique italienne, telle qu’elle s’élabora sous l’impression prestigieuse de l’unité nouvelle et sous la menace des dangers que cette unité semblait courir, était une politique d’imagination et une politique de représailles : la force des choses réclame et les amis de l’Italie doivent souhaiter qu’aux fantasmagories Imaginatives succède l’observation des réalités vivantes, et au fantôme des représailles la vérité des solutions.