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attaques de leurs congénères ennemis et de profiter à leur tour de toute occasion favorable pour torpiller l’adversaire.


Ce ne sont pas là, du reste, les seuls torpilleurs dont puissent disposer au besoin le commandant de l’escadre de la Méditerranée et, au dessus de lui, le commandant en chef.

Il y en a huit autres, beaucoup plus petits, il est vrai (15 à 18 tonnes), disposés sur le pont d’un grand bâtiment rapide d’un type spécial, la Foudre (6 000 tonnes, 20 nœuds, cuirasse de pont seulement, artillerie réduite).

Bien discuté encore, ce type spécial, cet « hybride » à qui l’on a voulu faire jouer les grandes utilités, — pardon de cette expression, — porteur et nourricier de torpilleurs, atelier flottant, magasin ambulant de torpilles de toute sorte et de matériel d’estacade, croiseur et éclaireur au besoin, transport, si c’est nécessaire, etc., etc.

D’aucuns prétendent qu’ayant tant de cordes à son arc, ce remarquable archer ne saura jamais bien de laquelle il doit se servir. Et puis quel nom singulier que la Foudre, pour une unité dont le rôle sera, dans tous les cas, plus utile que brillant ! ...

Enfin, nous la verrons à l’œuvre, et il est possible qu’elle montre de précieuses qualités. Quant à ses torpilleurs, si menus, si délicats, quand et comment les emploiera-t-on, à supposer qu’on les puisse débarquer commodément en pleine mer ? ...

On peut les débarquer par» temps maniable, » m’assure-t-on ; l’expérience en est faite. Leur utilisation ? — Supposez la Foudre arrivée pendant la nuit près d’un port où s’est réfugiée une division ennemie qui a des avaries, ou qui a besoin de se ravitailler, ou qui encore, se sentant serrée de trop près par des forces supérieures, se résout à combattre à l’ancre, sous la protection d’ouvrages à terre. Nos huit petits torpilleurs sont débarqués, déjà tout prêts à marcher, en pression et armés ; ils courent vers l’entrée du port, s’y glissent inaperçus en longeant, en serrant la terre, et attaquent brusquement à l’aube, « entre chien et loup, » l’heure de la grande fatigue pour ceux qui veillent depuis longtemps... C’est le succès presque assuré, grâce, justement, à l’exiguïté, à l’invisibilité relative de l’assaillant. Les grands torpilleurs d’escadre fussent venus tout seuls, ne demandant à la Foudre que du charbon et de l’eau douce ; mais ils auraient été découverts et canonnés.