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la fraternité cosmopolite. En annonçant cette fondation, Fun des membres les plus actifs de la Ligue belge de l’Enseignement, disait dans le Journal de Liège : « Que tous s’entendent pour abattre le monstre de l’ignorance, et avec lui cesseront ces guerres fratricides et ces rivalités absurdes, mais terribles, entre les nations. » Vauchez, un des collaborateurs de la première heure, associait en un commun souci « la barque de la Ligue » et ce qu’il appelait « la barque humanitaire ; » et il ajoutait qu’ « il n’y a que l’instruction qui puisse amener la fraternisation universelle. » Noël écrivait à Macé, son « cher frère en Voltaire, » que la Ligue de l’Enseignement portait dans ses flancs la Ligue de la Paix. Le futur directeur d’un pensionnat maçonnique lui adressait en ces termes ses vœux de succès : « Puissiez-vous voir les fruits de l’arbre symbolique, mis à la portée de tous, devenir la communion nouvelle des peuples régénérés ! « Edouard de Pompery, pour l’encourager, lui disait : « Travaillons à instruire, travaillons à la paix. » Et de la loge de Caen, qui précisément en 1867 recommandait à toutes les loges de France le livre du « frère » Edouard Talbot : l’Europe aux Européens, on écrivait à Macé : « C’est au moment où l’esprit d’ambition et de conquête s’apprête à frapper ses derniers coups, que les amis de l’instruction populaire doivent redoubler d’efforts. Que l’ignorance, cette pourvoyeuse des bagnes, des lupanars et de toutes les superstitions, soit vaincue, et notre siècle pourra peut-être voir s’élever, avant de finir, les premières assises des États-Unis d’Europe ! « La maçonnerie universelle transmettait à Macé de semblables échos : il travaillait d’ailleurs pour l’univers en même temps que pour la France. Son pensionnat alsacien du Petit-Château était comme le confluent des divers courans internationaux auxquels, en tous pays, l’activité maçonnique cherchait à creuser un sillon ; et lorsqu’il voyageait en Vénétie, en Lombardie, dans le Trentin, ou bien à Hambourg et à Copenhague, pour propager l’idée de la Ligue de l’Enseignement, la loge, dans chaque ville, était son point d’appui. Un bon Frère, du nom d’Aguettant, était comme le fourrier des excursions maçonniques de Macé : il le précédait, envoyait des détails sur les ateliers ; et puis Macé survenait et fraternisait. Son cœur humanitaire souffrait cruellement lorsqu’il constatait, par exemple, qu’entre les loges de Hambourg et de Copenhague, la guerre des duchés avait jeté un froid ; mais dans les loges italiennes, quel