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est d’être prévenu qu’elle est habituellement en échec pour les solutions riches en substance dissoute. Il faut, par suite, chercher une autre règle qui soit plus universelle et qui embrasse tous les cas. C’est à quoi M. Raoult paraît être arrivé, comme on le verra tout à l’heure, en substituant à la formule de Wüllner une formule plus large.


VI

Les lois précédentes permettaient, au point de vue barométrique, de comparer (au moins lorsqu’il s’agit de solutions étendues) les divers états d’une solution de même nature lorsque varient la température et la concentration. Elles ne. permettaient pas de comparer les solutions de nature différente.

Le rapport qui peut exister entre les dépressions produites par différentes substances avait échappé aux premiers observateurs. Les nombres de Babo et de Wüllner pouvaient former les élémens d’un tableau plus ou moins instructif pour l’histoire de chaque substance. Mais quand on passait d’une substance à une autre, il n’y avait plus de lien, plus de relation entre ces grandeurs spécifiques.

La considération des effets moléculaires a permis d’apercevoir cette relation. M. Raoult, en introduisant la notion de concentration moléculaire, au lieu de concentration en grammes, a subitement éclairé la question. Il a fait pour les dépressions de vapeur ce que de Vries a fait pour les pressions osmotiques. Le résultat de cette modification dans la manière de supputer les concentrations a été de faire apparaître cette loi importante, à savoir que l’action exercée par la substance dissoute sur la tension de vapeur du dissolvant est une fonction moléculaire, Ostwald dispute à M. Raoult le mérite premier de cette féconde remarque, qu’il aurait faite dès 1884.

Quoi qu’il en soit, on constate, en passant en revue les différentes substances dissoutes, que la dépression de vapeur est proportionnelle à la concentration moléculaire. Toutes les solutions équimoléculaires, c’est-à-dire qui contiennent la même fraction du poids moléculaire, ou le même nombre de molécules réparties dans la même quantité du dissolvant, présentent la même dépression de vapeur et, par conséquent, possèdent aussi le même point d’ébullition. Le nombre seul des molécules, et non leur qualité, intervient dans le phénomène. Toute molécule, quelle qu’elle soit, exerce, dissoute, la même dépression de vapeur. Le dissolvant restant le même, en qualité et en quantité, la dépression relative de vapeur est proportionnelle au nombre des