Dijon s’explique tout d’abord par les divisions de leurs adversaires. Aux élections de 1896, il y avait trois partis bourgeois en présence. Ces frères ennemis furent stupéfaits et consternés de voir la liste socialiste sortir victorieuse de leurs dissensions. Il faut ajouter que le parti socialiste à Dijon est dirigé par deux bommes très intelligens, appartenant à l’élite ouvrière, le citoyen Charlot et le citoyen Marpaux : de tempéramens différens, ils se complètent l’un l’autre. Le citoyen Charlot, ancien élève d’une école d’arts et métiers, dessinateur chez un chaudronnier industriel, est un organisateur de premier ordre. Le citoyen Marpaux, ardent propagandiste, l’un des membres dirigeans de la fédération socialiste de la Côte-d’Or, ne cesse de vanter la virilité et la fécondité du principe communaliste contre la centralisation jacobine et le parlementarisme. L’État embrasse trop pour bien étreindre. L’action dans la commune éveille le peuple à l’exercice de ses droits. Aujourd’hui il tend la main, demain il exigera[1].
De même que la municipalité de Roubaix, la municipalité de Dijon a développé les œuvres de protection ouvrière, les crèches, les cantines scolaires, etc. Elle a obtenu des pharmaciens une réduction de 50 pour 100 pour les assistés, et de 33 pour 100, pour les ouvriers syndiqués.
Des mesures spéciales ont été tentées en vue de remédier au chômage. On a pris pour modèle les syndicats de typographes. En 1896, la municipalité donnait une subvention égale au triple de la cotisation des intéressés, puis cette subvention a été réduite au double, avec la limite de 2 francs par jour. C’est pour la commune une dépense de 6 à 7 000 francs par an.
Le pain a été taxé officiellement, avec l’approbation du syndicat de la boulangerie.
La municipalité a pris le théâtre en régie, il coûte à la commune de 60 à 70 000 francs par an. Les socialistes vantent leurs préoccupations artistiques. La municipalité de Lille prétend, non sans quelque exagération, qu’elle a sauvé le Musée, abandonné à l’incurie bourgeoise. Celle de Dijon aspirait à relever le niveau de la comédie et de l’opéra. Nous y entendîmes le Tannhäuser, passablement chanté. A Lille, quatre cents places gratuites sont réservées aux amis de l’Hôtel de Ville. A Dijon, on s’est borné à réduire les tarifs des petites places.
- ↑ Mouvement socialiste du 1er avril 1900.