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rétribuées que celles de figurans de théâtre, de cantinières de pompiers, et de cantonniers fossoyeurs !

Un point essentiel de leur programme que les socialistes de Roubaix ont négligé, une fois au pouvoir, concerne l’institution d’une Bourse du travail. Ils en contestent l’utilité, ayant logé les syndicats dans l’immeuble de la société coopérative la Paix, et les ayant soustraits ainsi aux règlemens imposés par les pouvoirs publics. Dans un immeuble municipal, il faudrait recevoir tous les syndicats qui voudraient entrer, et ils échapperaient ainsi à l’influence des politiciens dirigeans. De même, à Lille, la municipalité a substitué à une Bourse un hôtel des syndicats. A Montluçon, nous voyons les syndicats qui ne veulent pas faire de politique, et prétendent se consacrer uniquement à la lutte économique, à la défense de leurs intérêts professionnels, en conflit avec la municipalité socialiste, qui songe avant tout à assurer le recrutement de ses bataillons électoraux, et ne se soucie guère de voir se développer, en dehors d’elle, un mouvement syndical indépendant.

La municipalité de Roubaix n’a pas abordé la question des octrois, l’une des plus importantes. Elle s’est bornée à diminuer les taxes sur quelques comestibles à bas prix, et à frapper ceux de consommation bourgeoise à un taux plus élevé. La meilleure opération qu’elle ait réalisée a été la suppression du régime d’abonnement pour bières fabriquées, et l’établissement d’une taxe d’après la quantité de bière mise en circulation. En 1899, la recette, de 600 000 francs, s’est élevée à près du double de ce que donnait l’abonnement en 1892.

La municipalité socialiste de Dijon est une des seules qui aient cherché à résoudre le problème de l’octroi, et qui se soit efforcée de tenir scrupuleusement toutes ses promesses.

Que des villes exclusivement industrielles, comme Roubaix, soient gratifiées d’un conseil de prolétaires, cela semble résulter du cours normal des choses. Mais qu’une ville telle que Dijon, cité de vieille bourgeoisie et de gros commerce, ancien fief républicain et capitaliste de M. Magnin, envoie des ouvriers, et parmi eux un vidangeur illettré, siéger dans le palais des ducs de Bourgogne, c’est un événement qui peut causer quelque surprise. Non moins que le brûle-gueule du citoyen Carrette, les bottes du citoyen vidangeur prouveraient qu’il y a quelque chose de changé, sinon que tout est perdu. Le succès des socialistes à