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Les socialistes accusent les journaux « bourgeois » d’éplucher leurs budgets, parce qu’ils n’ont rien de mieux à faire. Mais eux-mêmes ont jugé utile et opportun de présenter leur justification, à la veille des dernières élections de mai, dans une suite de monographies, publiées par le Mouvement socialiste.

Pour apprécier exactement cette gestion, il faudrait entrer dans le menu détail des circonstances locales, qui varient d’une ville à l’autre, examiner l’état des finances préparé par les municipalités précédentes. Un tel examen serait aussi long que fastidieux, Si l’on s’en tient aux caractères généraux, on constate une évolution identique à celle qui caractérise le régime républicain établi en France depuis 1871, mais plus accélérée, parce qu’elle est plus démocratique, vers l’augmentation des dépenses, l’accroissement du nombre des fonctionnaires, et l’extension du protectionnisme ouvrier. Cela même tient à la force des choses. Les socialistes ne peuvent arriver au pouvoir et s’y maintenir que par les satisfactions partielles données à leur clientèle ouvrière. Comme tout régime nouveau qui s’installe, ils sont obligés d’augmenter, contre leurs adversaires, le nombre de ceux qui ont un intérêt personnel acharné à le défendre, c’est-à-dire les fonctionnaires qui en vivent. Enfin, même en admettant qu’ils soient personnellement désintéressés, il résulte de cette double nécessité, que le budget des dépenses se gonfle, et qu’il faut augmenter pareillement celui des recettes, entamer les réserves des municipalités précédentes. Les municipalités françaises ne conduisent pas elles-mêmes, comme en Angleterre, de vastes entreprises industrielles et commerciales, en vue de subvenir à leurs besoins.

Afin de ne pas nous en tenir aux généralités, examinons deux municipalités : Roubaix et Dijon, dont le personnel dirigeant, bien qu’appartenant à la classe ouvrière, ou plutôt à différentes couches sociales de cette classe, est de valeur fort inégale. Tout, en dernière analyse, se ramène à la capacité des individus ; et ce ne sont point les opinions professées qui déterminent ces capacités.

Roubaix nous est présentée comme la ville sainte du collectivisme, dont M. Guesde est le prophète. Le monde entier, paraît-il a tenu les yeux fixés sur Roubaix. L’œuvre prolétarienne, créée par la municipalité socialiste, excite l’admiration, l’enthousiasme de tous les partisans du système ; Fauteur d’une brochure sur