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tout le personnel de la mairie se déclarait malade, et cette grève d’un nouveau genre contre les socialistes maîtres de la commune, les mettait dans un grand embarras[1]. Aux élections de 1895, ils avaient des représentans dans deux cents communes, aujourd’hui ils en ont dans trois cents. Ils avaient la majorité dans soixante-cinq communes : ils la possèdent aujourd’hui dans cent vingt. Mais ils ont fait la salutaire épreuve de l’instabilité de leurs électeurs. Ils ont subi des échecs et des revers dans le pays de Charleroi. qu’ils croyaient définitivement conquis. Dès 1894, les socialistes belges formulaient un programme municipal très étendu. Ils demandaient l’établissement de cantines scolaires, des fournitures de vêtemens aux enfans pauvres des écoles, un impôt spécial sur les terrains non bâtis et les maisons inhabitées. La bienfaisance publique transformée en assurance contre la maladie, le chômage, la vieillesse. Des asiles de vieillards et des asiles de nuit. La régie substituée à l’adjudication. Une assurance communale et intercommunale contre l’incendie. Les octrois sont, comme on le sait, supprimés en Belgique : pour obtenir plus de ressources, les socialistes belges réclament des impôts communaux, et la substitution de l’impôt progressif à l’impôt proportionnel.

Un des membres les plus en vue du parti ouvrier belge, M. Louis Bertrand, s’est fait une spécialité des logemens ouvriers. Sa nomination comme échevin de Shaerbeck, faubourg populeux de Bruxelles, dans un conseil où les socialistes n’étaient pas en majorité, a soulevé les mêmes difficultés de casuistique au sein du parti que l’entrée de M. Millerand dans le ministère bourgeois de M. Waldeck-Rousseau. Une société anonyme s’est formée, grâce à l’initiative de M. Louis Bertrand, pour la construction et la location d’habitations ouvrières. Les frais du capital ont été souscrits par la commune, la commission des hospices et le bureau de bienfaisance.

Le parti ouvrier en Belgique estime d’ailleurs que l’action de ses membres dans la commune n’a rien de spécifiquement socialiste, et qu’ils doivent viser surtout à une bonne administration. Avec cet esprit pratique qui pourrait servir de modèle à tous les partis, ils dirigent leurs efforts vers l’organisation et à la propagande, fédèrent les municipalités, centralisent les renseignemens

  1. Vinck, « le Socialisme municipal en Belgique, » Mouvement socialiste du 15 février 1900.