Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 160.djvu/195

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Nulle part le parti socialiste n’est plus puissant et mieux organisé qu’en Allemagne. Mais la social-démocratie est bien trop absorbée par la lutte politique au Reichstag, où elle a pénétré grâce au suffrage universel. Pour les municipalités des divers États, les modes de votât ions sont très divers et en général défavorables aux socialistes. A Berlin règne le système des trois classes qui donne la prépondérance à la richesse. Les socialistes ne peuvent espérer de succès que dans la troisième catégorie des électeurs, dont ils obtiennent un nombre croissant de voix, 4 800 en 1885, 26 000 voix aux dernières élections, contre 12 000 aux libéraux, et 3 000 aux antisémites. Les progressistes dominent dans la municipalité de Berlin ; les socialistes n’y forment qu’une minorité, dont M. Singer nous a exposé le programme : enseignement post-scolaire obligatoire pour les deux sexes jusqu’à dix-huit ans ; service médical gratuit ; budget de l’entretien des pauvres accru ; impôts communaux ; protection ouvrière, journée de huit heures pour les ouvriers municipaux ; gratuité des enterremens ; éclairage électrique enlevé à l’industrie privée. Dès 1847 la municipalité de Berlin obtenait le droit de fonder une usine à gaz : depuis 1876, elle exerce une action entière sur les travaux publics, et réclame plus encore d’autonomie.

Les socialistes allemands estiment qu’en dépit des obstacles que dresse devant eux « l’État monarchique et policier, » ils ont le vent dans leurs voiles, et que toute tendance poussant à la socialisation progressive de la vie économique, rapproche du port collectiviste. Ils se montrent toutefois plus patiens qu’autrefois et ils expriment des visées plus modestes et plus pratiques. M. Bebel, l’adversaire de Bernstein qui préconise la méthode et la tactique anglaise contre le révolutionarisme continental, se ralliait implicitement à ces idées dans un discours qu’il prononçait à Berlin. Il disait qu’il fallait faire de petits pas, avant d’entreprendre les grandes enjambées.

En Belgique, l’autonomie communale est enfermée dans d’étroites limites, mais le mode de suffrage permet aux classes ouvrières d’intervenir dans les élections communales. Il leur est arrivé au début de s’emparer du pouvoir dans certaines communes, et de ne savoir qu’en faire, parce que les élus manquaient de la connaissance des droits et de la pratique administratifs. Ils se heurtaient à l’hostilité et au mauvais vouloir des employés municipaux. A Courcelles, au lendemain des élections de 1895,