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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 juin.


Les derniers incidens de la Chambre et du Sénat ; ceux dont nous avons déjà rendu compte et ceux dont il nous reste à parler ; la démission du général de Galliffet, bientôt suivie de celle du général Delanne, chef de l’état-major général ; la discussion du projet de loi sur l’amnistie et le vote incomplet auquel elle a abouti jusqu’à présent ; le dépôt du budget de 1900 et la nomination de la commission qui est chargée de l’examiner à la Chambre ; le retrait du projet de loi sur les successions, qui était soumis au Sénat et que le gouvernement a jugé à propos d’incorporer au budget, tout cela a porté à son comble une confusion qui était déjà très grande et dans laquelle il sera bien difficile de remettre désormais un peu d’ordre et de clarté. Nous vivons dans une crise perpétuelle. Jamais l’anarchie morale n’a été plus grande, ce qui est un mal très grave en soi-même, et qui le devient encore davantage par la désorganisation qui ne tarde pas à en résulter pour tous nos services publics.

Cette désorganisation est particulièrement redoutable dans l’armée. Tout le monde sait aujourd’hui que, si le général de Galliffet a donné sa démission, c’est parce qu’il avait chaque jour plus de peine à défendre son ministère contre l’intrusion de la politique, et de quelle politique ! Le jour où il s’est rendu compte de son impuissance, il est parti. Avec lui, une dernière digue a disparu : son successeur ne paraît avoir rien fait pour la maintenir. Nommé pour être un instrument, il n’a pas cherché à être autre chose. Ce que le général de Galliffet n’avait pas voulu faire, il l’a fait sans résistance. Du moins il n’y en a pas eu de sa part ; mais il en a lui-même rencontré ailleurs. Le général Delanne a demandé à être relevé de ses fonctions de chef de l’état-major général, ne voulant pas assumer plus longtemps la responsabilité d’un service abandonné à des influences extérieures, qui n’avaient rien de militaire. Le jour où l’état-major général est tombé entre les mains d’un groupe de politiciens, la place d’un vrai soldat n’est plus là. Si