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qui lui permettaient d’avoir une action réelle sur la marche des affaires. Elle doit être désormais un simple instrument entre nos mains et, dans peu de jours, je verrai à écarter d’elle les personnages de sa famille que je sais hostiles à la France, et qui, très certainement, sont en complicité avec les rebelles. »

L’heure était venue, en effet, où il ne suffisait plus d’attendre le bon plaisir de l’entourage de la reine et des fonctionnaires hovas pour faire exécuter nos volontés et affirmer notre autorité. Déjà, à la suite des premiers faits insurrectionnels, une enquête avait été ouverte par M. Laroche, qui avait abouti à plusieurs condamnations, soit à la mort, soit à l’exil[1]. Mais, atteignant des sous-ordres, ces condamnations étaient pour la plupart demeurées sans effet moral. Le général Gallieni se résigna à frapper à la tête pour s’épargner, par la suite, un trop fréquent recours aux mesures de rigueur. Or, deux hommes considérables, Rainandriamanpandry, ministre de l’Intérieur, et le prince Ratsimamanga, parent de la reine, depuis longtemps suspects, furent convaincus d’avoir trempé d’une manière active et soutenue dans la rébellion[2] : traduits devant le conseil de guerre, ils furent condamnés et exécutés le 12 octobre, en même temps que la princesse Ramasindrayana, très connue pour son hostilité et ses intrigues, était exilée, et que le premier ministre choisi par le général Duchesne donnait sa démission sans être remplacé[3].

Ces mesures énergiques produisirent un effet immédiat : dès la fin du mois, le général Gallieni câblait qu’il n’aurait plus besoin de renforts. Les fonctionnaires hovas naguère hésitans, et les nobles désormais inquiets pour leur responsabilité personnelle, s’employaient maintenant à seconder utilement ses efforts. En quelques semaines, nos postes refoulèrent la rébellion jusque dans la région forestière, laissant derrière eux un pays où la population, hier terrorisée par les insurgés, aujourd’hui rassurée, se reprenait aux travaux de culture. Pour soulager les troupes

  1. On a fait quelque bruit, en 1896, autour des prétendues cruautés du général Gallieni. Il est à remarquer que, du fait de l’insurrection, 63 condamnations à mort ont été prononcées, dont 34 par le tribunal malgache, 9 par la cour criminelle et 20 par le conseil de guerre. de ces 63 condamnations, 40 proviennent des procédures achevées ou commencées sous M. Laroche.
  2. Voir, au Journal Officiel, le rapport du général Gallieni, mars 1899.
  3. Rasanjy devint dès lors le principal auxiliaire malgache de notre administration ; il l’est encore.