Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 159.djvu/811

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

seulement des questions alors posées, et qui sont d’un caractère plus particulièrement politique, doivent être retenues ici, comme présentant un intérêt d’ordre très général.

Les premières impressions recueillies par le nouveau commandant en chef, à son arrivée dans l’île, au début de septembre, furent médiocres. Le paquebot qui le portait avait fait escale successivement à Mayotte, à Majunga, à Nossi-Bé, à Diego-Suarez et à Sainte-Marie avant de le débarquer à Tamatave, ce qui lui avait permis tout aussitôt de se former une idée d’ensemble. « Sur ces points, écrivait-il au ministre, on vit tout à fait à part du reste de l’île : pas d’instructions, pas de communications, pas de ligne de conduite commune. Aussi chacun agit-il à sa guise. Pour le moment, sur cette côte, tout est aux Hovas... Notre action est nulle ; leur pavillon flotte sur la plupart de leurs anciens postes... la contrebande s’exerce partout, les armes entrent échangées contre la poudre d’or des régions révoltées, et la douane, non organisée partout, ne fait aucune recette... Le mot d’ordre a été donné : on ne cultive pas, ce qui nous expose à une famine dans quelques mois ; déjà le prix du riz a doublé à Tananarive. » Et, une fois parvenu à Tananarive, dans son premier télégramme officiel du 29 septembre, il résumait ainsi son appréciation : « La situation est toujours mauvaise ; nos postes tiennent le pays plat à 2b kilomètres autour de la capitale. Le mouvement insurrectionnel est complet autour d’eux ; les convois de ravitaillement sont journellement inquiétés sur notre longue ligne de communication. Je suis obligé de renoncer provisoirement à garder la ligne de Majunga pour placer le gros de mes forces autour de la capitale et sur la route de Tamatave. »

Tel était le bilan, à l’inauguration du nouveau régime : le 27 septembre, onze provinces de l’Emyrne et du Betsileo avaient été mises en état de siège par M. Laroche et érigées en territoires militaires ; le même jour, le résident général signa l’abolition de l’esclavage ; le 28, il renaît ses pouvoirs au général Gallieni, le tout en stricte conformité avec les ordres ministériels.

Le général Gallieni se mit aussitôt à l’œuvre : « Le gouvernement a pensé, lui avait dit le ministre[1] en l’investissant de la totalité des pouvoirs civils et militaires sur l’ensemble de l’île, que vous accueilleriez comme un puissant encouragement une

  1. Dépêche du 22 septembre.