allemande, et la Diète ayant exclu de Francfort son comité directeur, les quatre rois allemands demandèrent au roi de Prusse de lui fermer ses États : il s’y refusa. — Mais il rejeta les propositions de ses ministres sur la responsabilité ministérielle et la limitation des pouvoirs de la Chambre des Seigneurs et à Kœnigsberg, dans la cérémonie du couronnement[1], il plaça lui-même le diadème sur sa tête à l’exemple de Napoléon Ier, et lorsqu’il eut aussi couronné la reine, il dit : « Je monte comme roi sur un trône entouré d’institutions conformes aux temps, mais pénétré de cette conviction que la couronne vient de Dieu seul, j’ai voulu confirmer dans un lieu consacré qu’en toute humilité je la reçois de ses mains. »
Ce combat constitutionnel n’était pas un de ceux qu’on tranche une fois pour toutes ; il renaissait sans cesse, surtout depuis le conflit militaire. Les ministres étaient soutenus par la famille du roi : la reine Augusta ne cachait pas son goût pour les institutions parlementaires, de même que le prince royal, entraîné par la princesse Victoria, sa femme. Roon, seul ; se séparant de ses collègues et de la famille royale, suppliait le Roi de ne pas céder. Le Roi se fût volontiers débarrassé de ses ministres libéraux, quoiqu’il n’aimât pas les figures nouvelles, s’il eût su par qui les remplacer. Roon ne s’en mettait pas en peine : « L’homme cherché existe, disait-il ; Votre Majesté n’a qu’à l’appeler ; c’est Bismarck, » Il l’avait indiqué dès 1860, lors des premières oppositions contre la loi militaire ; il y revint plus fort en juin 1861, quand la retraite de Schleinitz rendit vacant le département des Affaires étrangères. — Appelez Bismarck, répéta-t-il, c’est sa place.
Le Roi appréciait le courage et le loyalisme de Bismarck et n’eût pas mieux demandé que de le faire ministre, mais il en avait peur. Il l’appela pourtant de Saint-Pétersbourg.
Bismarck était alors devenu décidément un homme nouveau. Le Junker enragé d’absolutisme avait disparu dans la brume de plus en plus épaisse du passé ; maintenant il était convaincu de l’impossibilité d’une monarchie absolue, car où elle existe ce n’est
- ↑ 18 octobre 1861.