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LE ROI GUILLAUME
DE PRUSSE


I

Aucun prince n’a mieux compris et rempli le devoir royal que Guillaume, roi de Prusse. Il n’y a pas manqué un seul jour de sa vie. Son éducation avait été exclusivement militaire ; il ne fut initié aux affaires d’État qu’à quarante-quatre ans, lorsque son frère le nomma membre du ministère avec le titre de prince de Prusse. A son avènement à la régence, il ignorait à peu près complètement les institutions et le mécanisme gouvernemental. Mais il n’entendait pas être une simple griffe, et sa conscience se refusait à rendre obligatoires des lois dont il ne saisirait pas la portée. Il s’initia à toutes les spécialités du gouvernement d’un grand État, même aux principes de la science du droit. Au travail du matin au soir, sans autre délassement que le théâtre, où il restait encore accessible aux affaires, lisant tous les rapports, creusant toutes les questions, écoutant bien, saisissant vite, exprimant sa pensée avec une concision claire, sans recherche de phrases à effet, il a été toujours l’âme agissante, présente et visible à tous, de son gouvernement. « Je n’ai pas le temps d’être fatigué, » disait-il à ceux que son immense labeur surprenait. Très sérieux, très réfléchi, très prudent, il pesait les chances avant de s’engager et se préparait à les rendre favorables ; mais il savait aussi prendre promptement sa résolution à l’heure des crises pressantes, et comme sa volonté était aussi ferme que calme, une

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  1. Voyez la Revue du 15 mai et du 1er juin.