quement pris son parti, et c’était à coup sûr ce qu’il avait de mieux à faire. Mais non. Il a fièrement rappelé, avec tous les autres, ses projets contre la liberté de l’enseignement, et c’est entouré de cette escorte qu’il s’est présenté à la tribune, audacieux et provocant, soulevant les applaudissemens frénétiques des radicaux et des socialistes, en même temps que les protestations des libéraux. Il brûlait ses vaisseaux. Malheureusement pour lui, d’autres se rappellent ce qu’il a oublié, ou ce qu’il voudrait faire oublier. Jamais l’éloquence de M. Ribot n’avait été plus vengeresse. Chacune de ses phrases portait coup. Il fut un temps, disait-il, où les hommes politiques attachaient leur honneur à rester fidèles à un programme, s’oubliaient eux-mêmes pour le faire triompher, arrivaient au pouvoir pour l’appliquer, et en tombaient pour ne se relever qu’avec lui. Ces temps sont-ils finis pour toujours ? Ne reviendront-ils plus ? « Je vous ajourne à six mois, » a dit M. Ribot en terminant. Six mois, c’est beaucoup : le cabinet ira-t-il jusque-là ? Il a eu, à la vérité, une majorité d’une cinquantaine de voix ; mais nous doutons qu’il puisse faire avec elle un long voyage sur une mer aussi orageuse que celle où le voilà embarqué.
Au débat sur la politique générale, un autre n’a pas tardé à se substituer. Depuis qu’il est convenu qu’on n’en doit plus parler, de l’affaire Dreyfus, tout le monde continue d’y penser, et il y a des gens qui s’en occupent d’une manière plus active. Quelques jours avant la rentrée des Chambres, un journal parisien a formellement accusé le ministère de l’Intérieur d’avoir lancé ou laissé s’engager quelques-uns de ses agens sur une piste qui devait conduire à une revision nouvelle. L’accusation portait que ces agens avaient été mis au service d’intérêts privés, ou même aux ordres de particuliers. Et quels particuliers ? Dieu nous garde de faire des personnalités inutiles : mais enfin, il faut bien dire que M. Joseph Reinach, à la veille des élections municipales, avait jugé tout à fait opportun de prononcer à Digne un grand discours, dans lequel il nous informait qu’aussitôt après l’Exposition, l’affaire serait rouverte. Par une fâcheuse coïncidence, on surprenait en même temps, chez quelques agens de la Sûreté générale, des menées sur la nature desquelles on n’a fait qu’à moitié la lumière, Enfin, — et c’est ce qui donnait de la gravité à une intrigue en elle-même assez vulgaire, — la correspondance d’un de ces agens était tombée entre les mains d’un député : elle avait été soumise à M. Le Hérissé par un officier de l’État-major général, le capitaine Fritsch.
Hélas ! dirons-nous : voilà encore une victime de l’Affaire, un brave et loyal officier, aux antécédens duquel M. le général de Galliffet a