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secondaire qui est seulement un peu plus simple que le procédé synthétique des chimistes, en ce qu’il se produit spontanément dans les circonstances ordinaires.

L’indigotier, comme le pastel, est effeuillé ou fauché aussitôt qu’il monte en fleurs. Cette opération peut être répétée jusqu’à deux et trois fois dans l’année, de telle sorte que la plante fournit un ou deux regains. On renouvelle d’ailleurs le plant tous les ans, quoiqu’il soit capable de vivre une dizaine d’années, parce que les pieds jeunes fournissent la matière la plus belle.

Le traitement consiste à entasser les feuilles dans de grandes cuves en maçonnerie où elles sont immergées dans l’eau et abandonnées à la macération pendant quelques heures, habituellement pendant une journée. On évite de les fouler. La fermentation se déclare dans ces cuves, comme dans celles de la vendange, à cela près qu’elle est plus rapide ; des gaz se dégagent de même, et de même aussi une écume remonte à la surface. Le suc qui sort des feuilles est jaunâtre : il contient, à ce moment, une substance incolore, l’indican. C’est la matière première. La fermentation la transforme en indigo blanc. Le liquide chargé d’indigo blanc est soutiré dans un nouveau bassin où on l’aère vigoureusement au moyen de palettes et de bâtons agitateurs. L’indigo blanc s’oxyde ; il devient indigo bleu. Celui-ci, étant insoluble dans l’eau, se dépose. La précipitation est facilitée par l’addition d’une petite quantité d’eau de chaux. C’est cette bouillie, égouttée, moulée en pains et desséchée, qui est livrée au commerce.

La préparation est trop simple, et trop bien calquée sur celle des boissons fermentées, pour n’avoir pas été connue de temps immémorial. Et, en effet, les anciens préparaient l’indigo, et l’employaient ; — mais, à l’exception des Egyptiens, ils ne surent pas le dissoudre et par conséquent le faire servir à la teinture. L’indigo est insoluble dans l’eau, dans l’alcool, dans l’éther et dans tous les dissolvans habituels. Il n’a d’autre dissolvant que l’acide sulfurique. Il s’y liquéfie en formant une liqueur bleue, le sulfate d’indigo ou bleu de Saxe. Avec l’acide sulfurique fumant, on obtient une liqueur pourpre.


La découverte de l’indigo artificiel, c’est-à-dire la préparation synthétique de cette substance par des procédés de laboratoire, est un fait tout récent qui ne peut donc pas encore avoir produit toutes ses conséquences. Elles peuvent être considérables, au