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presque incroyable des vases en pierre dure sortis de ces fouilles est à lui seul une preuve que la possession de ces vases était regardée comme une grande richesse : il y en avait de tout modèle et de toute matière, depuis les grandes jarres jusqu’aux vases de formes fines et soignées faisant penser déjà aux formes actuellement en usage, et depuis la diorite jusqu’au cristal de roche, en passant par des pierres très rares, comme la pierre aulaire, par le marbre, la calcite, le jade, et d’autres dont je ne sais pas encore les noms. Les hommes de cette époque avaient une habileté réellement prodigieuse pour tailler les pierres ; ils devaient déjà disposer d’outils spéciaux très perfectionnés, car comment auraient-ils pu creuser des blocs d’onyx de 0m, 98 de hauteur, et cela jusqu’à une épaisseur qui n’est que de 0m, 03 ou 0m,04 ? Il leur fallait évidemment une patience à toute épreuve, mais il leur fallait aussi une habileté consommée, quoique primitive et rudimentaire par certains côtés. Ainsi, presque toujours, le vase n’était pas régulièrement creusé, l’épaisseur des deux côtés n’était pas uniforme, en admettant que les diverses épaisseurs d’une même partie d’un vase aient été voulues. Le fait était tellement certain que, bien souvent, des fragmens d’épaisseurs variables se raccordaient entre eux et qu’on a pu en constituer des vases complets, sinon intacts. Malgré cette imperfection du travail, on ne saurait trop admirer la finesse de certains vases en une pierre qui se rapproche de très près du jade, car il a fallu l’analyse la plus détaillée pour l’identifier et des connaisseurs expérimentés s’y étaient d’abord trompés : cette épaisseur s’amincit jusqu’à deux ou même à un millimètre. Quand on voit une semblable finesse, on n’est pas étonné que ces mêmes vases aient été d’une extrême fragilité et que les fabricans de cet âge aient déjà trouvé les moyens de raccommoder les fragmens. Ils le faisaient avec une composition où il entrait peut-être de la gomme laque, et cette composition a été assez solide pour durer jusqu’à nos jours. Parfois même, cette composition avait si bien recollé le vase qu’au jour de la spoliation, les coups de hachette l’ont brisé à nouveau, mais non pas dans la partie recollée.

De quels outils pouvait-on se servir afin d’arriver à un résultat si extraordinaire ? Ces outils, s’il faut s’en rapporter uniquement aux objets trouvés, étaient de deux sortes : les outils en silex, les outils en métal. Les premiers étaient en nombre considérable : en une seule des chambres de ce tombeau, on en rencontra plus