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POÉSIE

PISE LA MORTE

LE SUAIRE D’OR


Avec ses vieux remparts et ses palais de briques,
Couleur de sang séché dans la lumière d’or,
Ses quais nus qu’emplissait le mouvement d’un port
Et l’herbe qui verdit sur ses places publiques,

Avec son mol azur où s’engourdit l’effort,
Ses murs jaunes et doux, ses cloîtres, ses boutiques
Et l’Arno tournoyant ses eaux mélancoliques,
Pise dans le soleil depuis des siècles dort.

Air pur qui charrias jadis tant d’énergie,
Air toscan, air subtil que pare une magie,
Triste du souvenir flottant d’avoir été !...

Aube vive et soir tiède éclatent de lumière ;
Et rien n’est plus poignant que ce sommeil de pierre
Sous son léger linceul d’impalpable clarté.