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LA DUCHESSE DE BOURGOGNE
ET
L’ALLIANCE SAVOYARDE SOUS LOUIS XIV

LA DÉFECTION[1]

Nous avons dit l’admiration que devait, selon nous, continuer d’inspirer la machine diplomatique de Louis XIV, même à l’époque la moins brillante du règne. Nous n’en saurions dire autant de la machine militaire. Manifestement, elle fonctionnait mal, soit qu’elle fût usée pour avoir trop servi, soit qu’il ne se trouvât plus une main assez ferme pour en faire mouvoir les ressorts. La machine diplomatique demeura pendant près de vingt ans sous les ordres de Torcy, dont nous avons vu et verrons encore le rare mérite. Durant la même période, la machine militaire passe de Barbezieux à Chamillart, de Chamillart à Voysin. Avec Barbezieux, prématurément enlevé, avait disparu le dernier représentant de la grande école, celui qui avait la tradition. Chamillart était incapable, Voysin également, et Louis XIV, qui mettait toujours la main à toutes les besognes, n’était pas de force à suppléer par son intervention personnelle à l’insuffisance de ses lieutenans. Par sa gravité, par sa mesure naturelle, quand l’orgueil ne l’emportait pas, par sa discrétion poussée parfois jusqu’à la dissimulation, il était né diplomate, et

  1. Voyez la Revue des 15 mars et 15 avril.