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Elles étaient évidemment pour lui sa « profession de foi : » on serait tenté de dire son « testament » politique. Et, au point de vue proprement et uniquement littéraire, si nous ajoutons après cela qu’elles sont presque les premières où le lyrique ambitieux des Odes soit descendu de son Olympe pour entrer en contact avec les réalités de son temps, on aura peine à s’expliquer que les Discours des Misères de ce temps, quoique généralement cités avec honneur dans la plupart de nos histoires de la littérature, y tiennent pourtant si peu de place[1]. Le Ronsard qui sert de modèle au portrait qu’on en trace est toujours et surtout le Ronsard des Sonnets et des Odes, plus rarement celui des Hymnes, et jamais ou presque jamais celui des Discours. C’est précisément ce Ronsard que je voudrais faire mieux connaître, en m’appliquant à montrer quel « citoyen » ce poète, cet artiste, cet incomparable inventeur de rythmes, d’images et de mythes est devenu dès qu’il l’a voulu, ou plutôt et pour mieux dire, dès que les circonstances l’ont exigé.

Je réunis ici, sous le titre général de Discours des Misères de ce temps :

1° L’Élégie à Guillaume des Autels, poète et jurisconsulte excellent ;

2° L’Élégie à Loys des Masures, tournisien.

Ces deux Élégies, qui portent dans quelques éditions le titre de Discours, n’ont paru pour la première fois qu’en 1562, — ou du moins on n’en connaît pas jusqu’ici d’édition qui soit antérieure, — mais elles sont certainement de 1560. C’est ce qui résulte des allusions qu’elles contiennent au « tumulte d’Amboise : » le roi qui faillit en être victime était François II ; il vivait encore au moment où Ronsard écrivait ; et on sait qu’il mourut au mois de décembre 1560.

Discours des Misères de ce temps, à la Royne mère, Catherine de Médicis ;

Continuation du Discours des Misères de ce temps ;

Institution pour l’adolescence du roi très chrétien, Charles IXe de ce nom.

  1. Sainte-Beuve lui-même, dans son Tableau de la poésie française, et dans le Choix de poésies de Ronsard dont il l’avait fait suivre dans les premières éditions, n’a donné des Discours qu’une idée beaucoup trop sommaire.
    Je crois pouvoir en dire autant des quelques pages que M. Ch. Lenient, leur a consacrées dans son livre sur la Satire au XVIe siècle. Paris, 1866, Hachette.