Page:Revue des Deux Mondes - 1900 - tome 159.djvu/225

Cette page a été validée par deux contributeurs.


II

L’appareil qui sert à ces expériences, dans lesquelles une matière déterminée doit être soumise à la haute température de l’arc voltaïque, a reçu nom de four ou de fourneau électrique. Le premier modèle a été construit en 1883 par Siemens et Hutington dans une rue industrielle : d’autres, ceux de Cowles et de Acheson, parurent peu après.

L’appareil de M. Moissan date de 1892. C’est un instrument de laboratoire. L’auteur se proposait d’enfermer en quelque sorte l’arc électrique le plus intense dans la cavité la plus petite. Rien n’est plus simple en principe. Deux briques de chaux, bien dressées, s’appliquent exactement l’une sur l’autre : la brique supérieure sert de couvercle ; l’inférieure est creusée d’une cavité pour recevoir la matière à traiter ; celle-ci y est déposée à nu ou, dans d’autres cas, elle est contenue dans un vase de charbon comprimé, à parois minces, qui remplit incomplètement la cavité de la brique. Il ne doit pas y avoir contact entre le charbon et la chaux, parce que, à une haute température, ce contact pourrait permettre la formation d’un composé accessoire, le carbure de calcium. L’intervalle compris entre le creuset de charbon et la paroi de chaux vive est comblé par une couche de magnésie en poudre. Sur la face supérieure de cette même brique, deux rainures sont ménagées pour le passage des électrodes de charbon entre lesquelles doit jaillir l’arc.

Il faut très peu de chose pour qu’un instrument aussi élémentaire soit bon ou mauvais ou seulement médiocre. Le premier four de Siemens, insuffisamment isolé, était en charbon, substance conductrice : il laissait donc dissiper une partie de la chaleur. Le four de M. Moissan était en chaux vive, substance si isolante que l’expérimentateur peut retirer à pleine main, sans se brûler, le couvercle dont la face inférieure est incandescente. De plus, dans le creuset de Siemens, la matière à traiter était traversée par l’arc, disposition qui, outre la complication de l’électrolyse possible si la matière est liquide ou fondue, entraîne l’inconvénient d’y mêler les impuretés de l’arc lui-même, telles que le charbon et la vapeur de carbone. Dans le four de M. Moissan, l’arc est placé au-dessus du creuset sans contact avec la matière ; celle-ci ne s’échauffe que par rayonnement et convection.

Les tiges de charbon sont mobiles dans leurs rainures, de manière à pouvoir être rapprochées ou éloignées à volonté. L’expérimentateur