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inférieurs à 300 ampères et 50 volts, l’altération reste superficielle. Il se forme seulement, sur les surfaces exposées à la flamme électrique, un revêtement de cristaux blancs et brillans de chaux pure, c’est-à-dire d’oxyde de calcium. Une cristallisation ignée de ce genre, se produit, parfois, dans les fours d’exploitation industrielle, en certains points où la température a pu s’élever accidentellement. MM. St. Meunier et Levallois en ont observé un exemple dans un four continu chauffé par des gaz combustibles.

Avant M. Moissan, plusieurs expérimentateurs avaient eu l’idée de recourir à l’arc électrique pour réaliser des températures élevées. L’une des premières tentatives de ce genre est due au physicien Despretz. Dès l’année 1849, ce savant avait essayé d’utiliser le triple concours de la pile voltaïque, du soleil et du chalumeau, dans le dessein de fondre et de volatiliser le charbon. Il avait obtenu ainsi une poudre de cristaux brillans et durs qu’il avait pris pour de la poussière de diamant et qui n’étaient, très probablement, que des cristaux de siliciure ou de borure de carbone mélangés à du graphite.

D’autres expérimentateurs, depuis, ont renouvelé ces essais, dans des conditions plus ou moins complexes. Ils ont demandé en quelque sorte à l’arc voltaïque, employé en bloc, toutes ses énergies ; ils ont mis enjeu non seulement les effets calorifiques, mais les effets électrochimiques ou électrolytiques. Ce sont là cependant des phénomènes distincts, quoique simultanés. Le flux qui constitue l’arc voltaïque se comporte, en effet, comme le courant lui-même ; il sépare en ions les composés susceptibles d’électrolyse, en même temps qu’il en élève la température, en raison de la résistance qu’il rencontre à son passage. Toute une série d’opérations, industrielles autant que scientifiques, ont été fondées sur cet emploi du courant électrique intervenant par ses deux modes d’activité. Ces applications constituent l’Électrochimie et sa partie principale, l’Électrométallurgie. Celle-ci, depuis quelques années, a pris une extension et un développement remarquables et très dignes d’intéresser les esprits curieux.

M. Moissan se distingue des chercheurs qui ont marché dans cette direction, en ce qu’il a voulu nettement séparer l’action électrique du courant de son action calorifique, et ne prendre à l’arc électrique que les phénomènes thermiques puissans qu’il peut produire. Les découvertes qu’il a faites, les progrès considérables qu’il a accomplis se rapportent donc exclusivement à ce que l’on peut appeler « la chimie des hautes températures. »