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deux charbons une série de cordons gazeux, présentant une grande résistance au passage de l’électricité et s’échauffant en conséquence, jusqu’au point de devenir lumineux. L’éclat de cet arc est rendu plus vif par les particules de charbon entraînées à l’état solide. On sait que c’est là une condition générale des flammes que leur intensité lumineuse est en proportion des particules solides qu’elle contiennent.

La température de l’arc voltaïque est très élevée. Elle est difficile à évaluer exactement et l’on conçoit que les physiciens soient divisés à cet égard. M. Violle, dont l’avis est prépondérant dans les questions de ce genre, l’estime à 3 500°, — ce qui est exactement le double de la température de fusion du platine. Du moins est-ce le degré thermique qu’on assigne au charbon incandescent qui constitue le cratère ou pôle positif de l’arc. Et, si ce n’est pas là l’expérience réelle qui a été exécutée, c’est au moins une manière de s’en rendre compte que d’imaginer un calorimètre perfectionné du type de Regnault ou de Berthelot, dans lequel on ferait tomber cette pointe incandescente ; on déduirait ensuite sa température de l’élévation déterminée dans l’appareil. Cette température de 3 500° a été considérée comme indépendante de la puissance de l’arc. M. Moissan pense, au contraire, qu’elle varie dans une assez large mesure avec l’énergie du courant. Dans un grand nombre des recherches qu’il a réalisées, le nombre de 3 500° aurait été dépassé.

À de si hautes températures, la chaux vive cesse de se montrer réfractaire : elle se ramollit comme de la cire. Elle peut couler et se liquéfier complètement lorsque l’on met en œuvre des courans très puissans. Il faut noter que la chaux, étant aussi peu conductrice de la chaleur qu’elle est peu fusible, retourne à l’état solide aussitôt qu’elle échappe au contact direct du faisceau électrique, et qu’elle prend alors la forme d’une masse cristalline confuse.

Cette fusion de la chaux devient un sérieux embarras lorsqu’il s’agit d’utiliser les hautes températures. On ne dispose pas de beaucoup de matériaux réfractaires pour la confection des appareils où s’accomplissent les opérations, et voici que l’une des deux ou trois substances les plus résistantes que l’on connaisse se laisse attaquer. Avec un courant de 1 200 à 2 000 ampères et de 100 volts, la chaux coule comme de l’eau et se vaporise avec violence. Les briques de chaux qui forment l’autel se ramollissent, fondent, se soudent entre elles ou coulent plus ou moins ; et, indépendamment des autres inconvéniens, l’appareil est mis hors de service dès la première séance. Il est vrai que ce n’est là qu’un cas extrême. Avec les arcs moins puissans,