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LE MOUVEMENT PANCELTIQUE




« Dans ces régions du Royaume-Uni, que l’Anglais nomme dédaigneusement la « frange celtique » de son riche manteau, écrivait naguère un savant professeur de l’Université de Greifswald, M. Zimmer, couve une agitation puissante, dont les conséquences possibles échappent à l’aveuglement des pouvoirs publics. » On ne saurait dire mieux et sinon plus élégamment, du moins plus exactement. Car il n’est pas certain que le panceltisme soit encore complètement dégagé des limbes de la préhistoire. Mais on peut remarquer aussi qu’il n’est plus à l’état d’aspiration vague, d’idée flottante, et qu’il commence à se préciser en actes. Les cinq grands dialectes de langue celtique reprennent vie presque partout ; un fort parti autonomiste s’est constitué en Irlande, en Galles, en Écosse, même en Bretagne. Isolés d’abord, sans programme commun, ces divers mouvemens se sont cherchés, rapprochés et, s’ils ne se sont point fondus encore, M. Zimmer estime qu’ils y tendraient du moins ouvertement.

On peut différer d’avis avec M. Zimmer. On peut surtout marquer ses réserves sur le rôle qu’une province française, la Bretagne, serait appelée à jouer dans le débat : en tout état de cause, cette province ne saurait s’affranchir de la stricte neutralité que lui imposeraient les convenances à défaut des lois générales du pays. Encore est-il qu’au lendemain des fêtes de Cardiff et quand la Grande-Bretagne se trouve engagée avec les Républiques sud-africaines dans un conflit où elle ne veut voir qu’une crise intestine, provoquée par une simple question d’autonomie administrative et politique, il n’est pas sans intérêt de considérer ce que cette même question, posée au sein du Royaume-Uni par la fraction celte du royaume, a déjà soulevé et menace de soulever d’orages.