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REVUE MUSICALE


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Les « Grands oratorios » à l’église Saint-Eustache. — Un chef d’orchestre :
M. Félix Weingartner
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Le Messie de Hændel, le Requiem de Berlioz, la Cène des Apôtres, de Wagner et la Terre promise, de M. Massenet, enfin la Passion selon saint Mathieu de Jean-Sébastien Bach, telles sont les œuvres, ou chefs-d’œuvre, que pendant ces trois mois, avec autant de soin que d’ardeur, M. Eugène d’Harcourt a fait exécuter à Saint-Eustache. Cela ne veut pas dire qu’il les y ait fait entendre. L’insuccès, d’ailleurs exclusivement acoustique, de cette noble entreprise, ne serait pas un médiocre avantage, s’il démontrait enfin qu’il n’y a place à l’église que pour la musique d’église, et que toute autre y constitue un manquement, d’abord aux convenances du culte, et puis, et peut-être encore davantage, à celles de l’art.

« Ma maison est une maison de prière. » Pour être admise en cette maison, que la musique lui ressemble donc et soit de prière aussi, rien que de prière. Soumise et comme incorporée à l’office, que jamais elle n’en altère le texte, l’ordre et la durée. Non contente de ne point contredire à la liturgie, qu’elle n’empiète pas sur elle et ne la déborde pas. Un tel respect, une pareille obéissance n’est le fait ou la vertu que de deux formes musicales, et ces deux formes nécessaires et suffisantes de la musique d’église, on ne saurait assez le répéter, sont la polyphonie palestinienne et surtout le chant grégorien. La meilleure preuve que toute autre musique, fût-elle religieuse et sacrée, s’accorde mal avec la sainteté du lieu, c’est que le clergé ne prête à des concerts même spirituels qu’un sanctuaire vide, et qu’un oratorio comme le Messie ou la Passion s’exécute, il est vrai, dans une église, mais dans une église désaffectée.

L’inconvenance ou la disconvenance esthétique est peut-être encore