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l’imitation de son frère à celle des Harlémois antérieurs, avec plus d’agrément que dans son Festin champêtre de 1616 ; mais ce morceau, déjà très caractéristique, malgré ses inexpériences, est sa première œuvre connue et devient, à ce titre, un document intéressant. La Dame à sa toilette de Pieter Codde, l’un des plus habiles et courus, parmi ces peintres galans, et qui eut l’honneur, en 1637, d’achever, pour la ville d’Amsterdam, un grand tableau de son maître Hals, donne mieux l’idée de ce petit maître. Toutefois, de toute l’école, ceux qui lui font ici le plus d’honneur, ce sont les deux frères Van Ostade.

L’aîné, Adriaan Van Ostade (1610-1685) est un élève direct de Frans Hals, chez lequel il eut pour condisciple Adriaan Brouwer, né en Flandre, mort en Flandre, rangé, par conséquent, parmi les Flamands, mais qui, en réalité, pour l’esprit comme pour la technique, demeura toujours un bon Hollandais. Cette camaraderie explique les ressemblances de pratique qui frappent les yeux dans leurs œuvres juvéniles. Un peu plus tard, Adriaan fut séduit par le génie de Rembrandt : sur la fin de sa vie, comme la plupart de ses contemporains, il s’assoupit et se refroidit, sous l’influence de la réaction académique. De là, dans sa carrière, trois étapes dont MM. Bode et Brédins ont pu déterminer, avec leur expérience sagace, les principaux caractères : 1° de 1630 à 1640 environ, la jeunesse, rivalité avec Brouwer, un goût libre et hardi pour les rusticités franches et joviales, pour les types accentués, presque des caricatures, une touche d’abord un peu sèche et froide, bientôt chaude et large, dans une tonalité d’abord claire et bleuâtre qui de même se modifie, se fortifie, se brunit, se réchauffe ; 2° de 1640 à 1665, la maturité, l’admiration de Rembrandt, une perfection croissante dans l’art de la composition, tant pour le groupement des figures que pour la disposition de l’éclairage, une couleur plus blonde, plus fluide, avec une entente exquise des mouvemens lumineux et du clair-obscur ; 3° de 1665 à 1685, la vieillesse, retour lent aux pratiques d’école, au dessin par la ligne plus que par la forme et la couleur, affaiblissement progressif des tons locaux qui deviennent gris et ternes, en même temps qu’ils se désaccordent et que s’atténue le sens des valeurs. Dans ses trois périodes, d’ailleurs, c’est toujours un maître admirable pour la franchise, la belle humeur, l’aisance et la sûreté de la mise en scène. On peut facilement le suivre ici dans toutes ses évolutions, depuis quelques petits morceaux hésitans de la Collection Lacaze,