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bas, pour le plus grand bénéfice du consommateur anglais et de toutes les industries anglaises qui emploient le sucre comme matière première. La commission considère d’ailleurs que l’abolition de ces primes n’affecterait pas très vivement les cours, puisqu’elles sont peu de chose en comparaison des énormes droits de consommation qui existent par exemple en France et en Allemagne. Mais elle reconnaît que ces primes, dont le taux est souvent modifié, introduisent dans l’industrie sucrière un élément d’instabilité qui enlève toute sécurité et par suite tout crédit aux producteurs, et, par ce motif, est d’avis qu’il faut chercher à en obtenir la suppression.

D’autre part on a proposé de répondre aux primes par l’établissement de droits compensateurs sur le sucre de betterave, à son entrée dans le Royaume-Uni ; mais il est difficile d’apprécier dans quelle mesure ce système viendrait en aide à l’industrie sucrière des Indes occidentales. La commission n’est pas favorable à l’octroi de primes de sortie, qui auraient pour premier effet de faire frapper le sucre de ces colonies d’un droit d’entrée par les Etats-Unis, leur meilleur client. Elle considère que l’Angleterre a le devoir de leur venir en aide par d’autres moyens : la situation lui paraît compromise au point qu’elle croit certaines de ces îles incapables d’équilibrer leurs budgets et de payer les intérêts de leur dette. Elle propose de leur allouer des subventions sous diverses formes. Son président, toutefois, se séparant à cet égard de ses collègues, exprime l’opinion que des droits compensateurs devraient être établis par l’Angleterre, à l’entrée chez elle de sucres venant de pays qui accordent des primes. En dehors de cette mesure, le président ne voit pas de moyen d’empêcher la production sucrière aux Indes occidentales de décroître rapidement : « Alors même, ajoute-t-il, que, par des miracles d’économie et de travail, les colonies réussiraient à abaisser le prix de revient de leur sucre, rien ne garantit que les primes, dans les pays qui en accordent, ne seraient pas élevées de façon à annihiler ces efforts. » Le président pense que, si la mère patrie se décide à adopter ce système, il pourrait être étendu à l’Inde. On voit combien cette question du sucre déconcerte les législateurs, puisqu’une nation, libre-échangiste et hostile à l’intervention de l’État comme l’Angleterre, en arrive à envisager des expédiens du genre de ceux que préconise le président de la commission.