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fait, à plusieurs reprises, des professions de foi nettement socialistes. Si donc, pensent ses protecteurs intéressés, il voulait bien se décider à faire passer en ses ouvrages quelque reflet de ses convictions, il apporterait peut-être au parti ouvrier l’appoint d’un talent littéraire qui fait défaut jusqu’ici au prolétariat. De là ces ménagemens infinis à l’égard de Holz, et les précautions délicates qu’apporte la critique marxiste dans le maniement d’un amour-propre quelque peu souffrant.

Le parallèle de M. Mehring est susceptible de nous intéresser, à un point de vue tout différent du sien. Nous voudrions le reprendre à notre compte, non pas pour tenter de rétablir, comme lui, l’équilibre entre ces deux renommées inégales, mais afin de marquer la part de l’influence française dans la naissance de la jeune littérature allemande. C’est un sujet que la critique germanique élude à l’ordinaire, sur lequel il sera bon de jeter quelque lumière, et nous y trouverons l’occasion d’écrire un curieux chapitre de la psychologie des races. Nous ne saurions d’ailleurs consacrer une étude approfondie aux deux auteurs dont nous allons parler. Hauptmann, à lui seul, réclamerait un volume entier, car il ne laisse pas d’être gâté par ses commentateurs. Pour ce qui le regarde, nous voudrions simplement rechercher quelles sont, de l’aveu même de la critique allemande, les qualités qui ont assuré son extraordinaire fortune. Puis, munis de ces conclusions, nous nous efforcerons à déterminer quelle est, par l’intermédiaire de Holz surtout, la part qui revient à l’influence française dans la formation du talent si vanté de l’auteur des Tisserands.


I

L’œuvre de Hauptmann a donné naissance, en ces dernières années, à toute une littérature critique. Ce poète de trente-six ans a déjà ses biographes et ses exégètes. En peu de mois, ont paru trois volumes entièrement consacrés à l’étude minutieuse de sa production littéraire, ceux de MM. Schlenther, Bartels et Woerner, et, de plus, deux autres, dont Fauteur, M. Steiger[1], a traité du théâtre contemporain en général, mais a fait de

  1. Gerhart Hauptmann, par A. Bartels, Weimar, 1897 ; U. C. Woerner, Munich, 1891 \ Paul Schlenther, Berlin, 1898 ; — E. Steiger, Das Werden des neuen Dramas. .Berlin, 1898.