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séparément, au gré de ses intérêts, dans chaque guerre, la détermination de la contrebande en imposant sa liste de prohibitions à toutes les puissances ! Il faut souhaiter que cette nouvelle se confirme, car on ne peut rien sans l’adhésion du gouvernement britannique.

Il est facile de tracer en deux mots sinon tout le programme de la future conférence, au moins une partie de ce programme. Faut-il revenir aux principes de 1780 et reprendre le plan de Catherine II ? Maintiendra-t-on, à côté de la contrebande absolue, une contrebande relative, comprenant les marchandises d’un usage double et douteux[1] comme l’or, l’argent, les vivres ? si l’on supprime la contrebande relative, ne devra-t-on pas, en revanche, comprendre dans la contrebande absolue les objets qui, pour servir immédiatement à la guerre, n’exigent qu’un travail de juxtaposition[2] ; alors même qu’on supprimerait la contrebande relative, faudra-t-il laisser encore au belligérant, quant aux marchandises affranchies de la saisie, le droit de préemption introduit par l’ordonnance française de 1543 et remis en vigueur à la fin du XVIIIe siècle par les juges anglais ? enfin rompra-t-on avec la théorie du voyage continu ? Une immunité doit-elle être accordée définitivement aux bâtimens hospitaliers et aux paquebots-poste ? comment la limiter pour déjouer la fraude ? Les puissances qui obtiendraient sur ces divers points le vote d’un règlement fixe et non équivoque auraient bien mérité de l’humanité.


V. — OPÉRATIONS ENTREPRISES A TITRE PARTICULIER PAR LES RESSORTISSANT D’UNE PUISSANCE NEUTRE. FOURNITURES. — ENROLEMENS

Deux principes sont au-dessus de toute discussion. 1° Quand une puissance neutre procure elle-même à un belligérant des armes, des munitions, des subsides, elle enfreint les lois de la neutralité ; elle les enfreint encore, quand elle leur fournit elle-même des troupes auxiliaires. Mais il ne faut pas confondre les actes accomplis par l’Etat neutre et les opérations entreprises à titre particulier par ses nationaux. 2° Les actes faits à titre individuel par les sujets ou citoyens d’une tierce puissance ne peuvent être assimilés aux (actes accomplis par ses représentans légaux. En thèse, un gouvernement n’est pas responsable d’une

  1. Usus ancipitis, quæ in bello et extra bellum usum habent (Grotius).
  2. Par exemple, les machines ou parties de machines pour bâtimens de guerre.