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commerce allemand, et M. Voermann, président, répondit qu’elle allait provoquer une intervention du gouvernement. Une note diplomatique, contenant une protestation véhémente, fut, en effet, envoyée sur-le-champ à Londres. Les autorités de Durban ayant prétendu tout d’abord que le bâtiment saisi contenait vingt-trois officiers ou soldats qui allaient prendre du service dans les armées des deux républiques, l’armateur, mandé par le ministre des Affaires étrangères à Berlin, déclara que le Bundesrath ne transportait ni contrebande de guerre, ni volontaires pour le Transvaal. Cependant les journaux de Londres publièrent le 3 janvier, la dépêche suivante : « Le Bundesrath portait, outre 7000 selles, 5 gros canons, 50 tonnes de projectiles, et 180 artilleurs exercés. » Nouveau démenti. On finit par reconnaître que le navire contenait seulement des fusils de chasse, sans emploi pour la guerre et d’ailleurs expressément portés sur le connaissement. Une seconde note, plus énergique, fut envoyée au cabinet de Saint-James par le cabinet de Berlin. Cependant la presse allemande prit feu ; des articles très vifs furent publiés ; un mouvement d’opinion publique se dessina contre l’Angleterre. Ce mouvement devint de plus en plus violent à mesure qu’on apprit la saisie successive du Hans Wagner, autre vapeur hambourgeois (qui n’a été relâché que le 7 février), des paquebots impériaux Herzog et General, de la barque allemande Marie, venant d’Australie avec un chargement de farines pour le Transvaal. Le 8 janvier, les autorités coloniales anglaises se bornèrent à relâcher les passagers du Bundesrath ; le 16, elles débarquèrent la cargaison, après avoir reconnu qu’elle était conforme au manifeste, mais sans qu’il fût statué sur la validité de la prise : ces demi-mesures ne calmèrent pas l’effervescence générale.

Cette exaspération croissante du peuple allemand mit le gouvernement impérial dans un certain embarras. On ne pouvait pas contenir même les journaux officieux. L’interpellation de M. Mœller, député national-libéral au Reichstag, fut cependant retardée jusqu’au 19 janvier. La réponse de M. de Bulow, ministre des Affaires étrangères, fut catégorique et provoqua de longs applaudissemens. Le secrétaire d’Etat déclara qu’on avait illégalement convoyé le Herzog à Durban, illégalement débarqué le chargement du Bundesrath et du General, sans qu’il y eût une suspicion fondée de contrebande. Il répudia la théorie anglaise et anglo-américaine du « voyage continu : » l’Allemagne