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d’invoquer les rapports étroits qui lièrent, depuis le passage de Charles Ier jusqu’à l’arrivée du duc d’Athènes, la cour angevine de Naples et les villes guelfes de Toscane. Il était naturel que le culte dynastique voué par la famille royale à un roi de France et à un prince de Sicile se propageât parmi les partisans de la dynastie étrangère.

Revenons aux deux églises qui ont été notre point de départ, Santa-Croce et la basilique d’Assise. Et, laissant pour le moment les fresques et les peintres, ne pensons qu’aux donateurs qui ont appelé Giotto et Simone Martini dans l’oratoire des Bardi et la chapelle de Saint-Martin. Celle-ci fut fondée, en même temps que la chapelle Saint-Louis, où nous avons vu resplendir le vitrail aux fleurs de lys, par le cardinal Gentile di Montefiore. Or, cet Italien de la marche d’Ancône a joué un rôle dans l’histoire de la maison d’Anjou. Il fut envoyé en Hongrie comme légat apostolique par le pape Clément V pour conduire à Buda le jeune Carobert, petit-fils de Charles II, et il passa trois ans au milieu des magnats insoumis, fulminant ou levant tour à tour l’interdit et l’excommunication. Le cardinal mourut à Lucques en 1312, et les deux chapelles qu’il avait fait construire ne furent décorées que plusieurs années après sa mort. Mais les héritiers du légat, qui revêtirent les murs de fresques et les fenêtres de vitraux, attestèrent leur attachement à la maison d’Anjou en donnant dans la chapelle qu’ils avaient reçue en legs des places d’honneur aux deux saints Louis. On sait par Vasari qu’autrefois la chapelle de saint Louis, fondée par le cardinal Gentile sous le vocable du roi de France, était couverte de fresques représentant la vie de saint Louis de Toulouse. Le vitrail de cette chapelle, que j’ai déjà cité, est la seule œuvre d’art où l’on voie, près de saint Louis, roi de France, saint Louis d’Anjou figuré, non seulement comme évêque, mais comme prince. Le saint reparaît deux fois, désigné par deux inscriptions : d’abord en chape rose, avec la mitre et la crosse ; et, au-dessous, vu de profil, à genoux, en costume laïc d’écarlate, avec de longs cheveux roulés sur la nuque. Un ange tient au-dessus de lui sa couronne ; en face et en pendant, un autre personnage est agenouillé, en robe brune, avec un manteau noir à capuchon ; au-dessus de sa tête, un autre ange tient le chapeau de cardinal : c’est le prélat fondateur de la chapelle.

Quant aux Bardi, qui ont mis leur tombeau de famille sous la protection des deux saints Louis, on sait qu’avec les Peruzzi et